Internet recâble notre cerveau que l’on soit de la génération y ou digital migrant. La question est de savoir comment repenser les missions de l’école dans ce nouveau contexte. Et là deux écoles s’affrontent. D’un côté le tout numérique zappeur et de l’autre les partisans de l’#apprentissage profond. L’article conclue par un entre deux. Pour moi, il faut passer de l’un à l’autre et développer cette double compétence. Les neurosciences nous donneront des billes demain. Pour le moment on est en phase de compréhension.
Michel Serres l’a joliment surnommée « Petite Poucette », en raison de la dextérité et la rapidité avec laquelle l’individu type de cette génération née après 1980 fait usage de ses pouces pour tapoter sur les écrans numériques. D’autres ont opté pour des termes plus génériques, comme la « génération du Millénaire », la « génération Y » ou encore la « génération Net ». L’appellation qui a eu le plus de succès est certainement celle du futurologue américain Marc Prensky, qui parle depuis 2001 des « ##digital natives », les enfants du ##numérique pourrait-on dire en français.
Gérard Berry, informaticien et professeur au Collège de France, note ainsi que « la numérisation induit ainsi des inversions mentales, autrement dit des retournements de perception quant à des actions élémentaires de la vie courante ». Il prend l’exemple de l’écriture de textes. « Alors que la machine à écrire du XXe siècle associait le temps de l’écriture physique à celui de la frappe, le traitement de texte moderne les dissocie complètement, ce qui modifie considérablement la façon de lier pensée et écriture. » L’expérience de l’espace est elle aussi bouleversée : « En 1999, quand je voyageais, j’achetais une carte, je la dépliais, je cherchais l’endroit où je me trouvais et ma destination, puis je visualisais l’itinéraire à suivre. En 2012, j’ai toutes les cartes du monde sur mon téléphone ou mon GPS, qui me disent en permanence où je suis. Je tape le nom de ma destination, et l’itinéraire s’affiche. Toute l’opération est donc mentalement inversée. »
À ce sujet, Gary Jones a réalisé une expérience tout à fait intéressante. Il a sélectionné six personnes, trois particulièrement habituées aux nouvelles technologies et trois particulièrement ignares en la matière. En observant l’activité de leur cerveau avec un IRM, il leur a demandé de réaliser une recherche sur Google. Les deux groupes ont activé des zones différentes de leur cerveau au cours de l’expérience, les technophiles utilisant tout particulièrement la partie avant gauche de leur cerveau (cortex préfrontal dorsolatéral) tandis que les autres n’utilisaient presque pas cette zone. Mais après cinq jours au cours desquels il a été demandé aux sujets ignorants de surfer une heure sur Internet, un deuxième IRM a montré l’activation du cortex préfrontal dorsolatéral dans leur cerveau. « Cinq heures sur Internet et le cerveau des novices s’était déjà recâblé », en conclut le chercheur.