« La « salle de classe » est un lieu où les élèves sont « forcément astreints à un silence, à une immobilité ». Difficile de ne pas être interpellé à la lecture de cette définition, proposée par Ferdinand Buisson dans son Dictionnaire de . Elle date de la fin du XIXe siècle, une époque qui peut sembler à mille lieues de notre monde à la pointe de la . Pourtant, il suffit à chaque professeur de lever les yeux sur les rangées de tables et le magistral tableau qui constituent le cadre scolaire ordinaire pour constater que cette définition reste d’actualité.
Les élèves de la « classe mutuelle » montrent qu’au traditionnel « service à table » des savoirs, ils préfèrent l’échange, la discussion entre pairs et la coopération. Un self-service éducatif, si l’on peut dire, qui leur redonne le goût d’apprendre. Comme le rappelle Michel Foucault, il existe un plaisir intrinsèque au savoir et c’est un tour de force, selon le philosophe, que l’enseignement ait « presque pour fonction de montrer combien le savoir est déplaisant, triste, gris » ! Le savoir scolaire, en lui-même, a une saveur mais ce sont les conditions dans lesquelles il est servi aux élèves qui peuvent l’affadir.
La pédagogie magistrale, aujourd’hui dominante dans le système éducatif, trouve ses racines dans l’enseignement simultané, théorisé dès 1680 par un ecclésiastique français, Jean‑Baptiste de La Salle. Ce dernier fonde, à Reims, l’Institut des frères des écoles chrétiennes dans lequel un maître dispense son cours conjointement à un grand nombre d’élèves, regroupés par âge. C’est une nouveauté pour l’époque. Cette va permettre de créer de meilleures conditions d’enseignement et d’unifier le matériel scolaire, mais elle impose aux élèves de rester assis, dans une salle polarisée vers la chaire du maître. Elle devient la norme en France suite à la loi Guizot sur l’instruction primaire du 28 juin 1833.

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