Les derniers mois et ses turbulences ont fait sauter des barrières, levé des tabous et révélé des nouvelles tendances et pratiques en formation. Bien plus que quelques ajustements, ce sont de véritables changements de paradigmes qui s’annoncent.
Isolé, mais connecté
Le e-Learning des années 2000 a inauguré un nouveau mode de formation : seul devant son écran. Ses initiateurs vantaient le « quand on veut, d’où on veut, à son rythme », un déploiement rapide, délocalisé, sécurisé, mais surtout un coût divisé par 2 ou 3 par rapport à la formation en salle. Une petite merveille ce e-Learning !
Sauf que… rapidement les apprenants l’ont appelé « boring learning ». En effet, si les promesses d’adaptation aux contraintes de chacun étaient alléchantes, rares sont ceux qui, quelle que soit la qualité des modules de formation, sont capables d’apprendre 100 % par eux-mêmes. L’absence cruelle de moyens d’échange avec les experts et les tuteurs, ou bien le manque de moyens humains pour accompagner les apprenants dans leur progression ont rapidement confirmé que le e-learning seul n’avait pas d’avenir.
Et puis, le temps a passé, et presque 20 ans plus tard, rien n’avait changé.
Mais 2020 a tout chamboulé, le travail à distance qui était jusqu’alors l’exception est devenu la norme, et tout le monde a appris à rester connecté malgré l’isolement.
La formation en a largement bénéficié, et ce qui était tant espéré, mais souvent impossible est devenu une réalité : les apprenants pouvaient enfin voir, questionner et échanger à distance avec les experts, les formateurs et les autres apprenants. Slack, Teams, et les autres outils digitaux de communication réservés aux geeks sont devenus le quotidien de tout un chacun.
Il semble aujourd’hui impossible de revenir en arrière. La nouvelle réalité de la formation à distance, c’est qu’elle inclut naturellement tous les moyens de communication synchrones ou asynchrones.
Digital, mais bien humain
Les contenus numériques de formation ont de sérieux avantages : une fois constitués, les diffuser, (quel que soit le nombre d’apprenants) est quasi nul, ils sont de qualité constante tout au long de leur diffusion, ils peuvent être vus et revus sans surcoûts, et surtout ils obligent à se mettre d’accord sur les définitions et les façons de formuler les concepts qu’ils traitent.
Que des avantages. Mais est-ce suffisant pour être plébiscité par les apprenants ? Pas vraiment. La transmission de savoir est une activité de mammifères. Sans incarnation, la formation n’en est pas.
Le Blended Learning vu comme le sauveur de l’e-learning n’a jamais eu le plein succès qu’on lui prédisait. L’alternance (l’empilage) de modalités distancielles et présentielles n’a pas réglé le principal problème : la présence humaine « dans » la formation.
La libération technique et psychologique de la classe virtuelle a permis d’user (voire d’abuser) de cette modalité pour réinjecter de l’humain dans les parcours de formation.
En complément, l’engouement pour les vidéos pédagogiques et les podcasts permet de « mettre en boîte » de façon rapide et naturelle son savoir. Des solutions sont même dédiées à l’apprentissage de ces nouvelles modalités de production de contenus de formation.
Exit les mascottes, et autres saynètes un peu désuètes, place est faite au formateur dans les formations digitales.
Autonome, mais accompagné
« Mettre l’apprenant au centre de la formation » a parfois été l’appellation un peu trompeuse du « débrouille-toi tout seul ! ». Cette distorsion cognitive n’a heureusement pas été générale, et les fausses promesses rapidement débusquées.
Le grand effort formation fourni en 2020 pour maintenir ou développer les compétences, utiliser avec profit les périodes creuses, garder du lien entre pairs, ont été quelques-uns des bénéfices de cette année inattendue.
Les apprenants ont bien été au centre de leur formation, plutôt que d’aller en centre de formation, mais n’ont pas été seuls. Les experts, formateurs, tuteurs, encadrants pédagogiques ont gardé le contact pour aider, accompagner, anticiper les difficultés et aider à les surmonter.
Tous ces changements, espérés, mais rarement faits, pour de fausses bonnes raisons, sont devenus la réalité des équipes pédagogiques, et semblent devenir durables.
À quelque chose, malheur est bon.
“La formation est maintenant bien dépoussiérée.” — Donald O’Cedar