L’homme est capable d’hacker son cerveau : exemple avec l’écriture et la lecture
Le concept de plasticité cérébrale, à la base de nos capacités d’#apprentissage, doit être manipulé avec prudence : l’organisation générale de notre cerveau telle qu’elle est génétiquement définie n’est pas drastiquement modifiée par ce phénomène adaptatif. Celle-ci n’opère que d’ingénieuses et subtiles modifications des réseaux neuronaux (réorganisation, recyclage, nouvelles connexions, etc.) qui permettent d’optimiser le fonctionnement de notre cerveau en fonction de nos expériences individuelles et collectives. La lecture et l’écriture constituent un exemple particulièrement étudié et décrit de cette faculté qu’ont développé nos cerveaux d’homo-sapiens.
La communauté scientifique estime ainsi que l’homme est parvenu à « hacker » son cerveau pour développer l’écriture et la lecture, il y a à peu près 5500 ans. Cette invention culturelle majeure résulte du détournement de l’algorithme de fonctionnement des régions du cerveau responsables de la reconnaissance des visages et objets4. Elle a conduit l’homme à créer les premiers symboles logographiques, puis les premières peintures rupestres et a abouti aux tablettes sumériennes puis aux parchemins et enfin aux livres. Il a dans un premier temps fallu à l’homme de nombreuses années de réflexion et de travail pour parvenir à la mise en place de tables de correspondance entre sons et symboles, les alphabets. D’abord réservé à quelques initiés, lecture et écriture ont ensuite beaucoup évolué au fil des siècles, notamment en s’adaptant aux possibilités et contraintes des réseau neuronaux sollicités. Dans un premier temps, l’absence d’espace entre les lettres imposait, aux quelques érudits qui la maitrisaient, une lecture à voix haute. L’introduction de la ponctuation et des espaces a par la suite permis de simplifier la lecture, de la rendre plus intérieure, plus propice au développement de la réflexion et de l’apprentissage. Enfin, l’invention de l’imprimerie a offert l’accès à la lecture au plus grand nombre en généralisant sa pratique et en l’intégrant aux processus éducatifs.
Ainsi, l’exemple de la lecture et de l’écriture est particulièrement intéressant pour comprendre les impacts croisés entre conception nouveaux outils et développement de nouveaux mécanismes cognitifs. Il permet par conséquent de nourrir et d’éclairer les réflexions posées par la révolution #numérique en prenant en considération la réciprocité des impacts entre technologies numériques et mécanismes cognitifs : notre cerveau nous permet d’inventer des outils adaptés à nos capacités et de faire évoluer nos capacités cognitives avec ces outils.