Le bon temps de la formation prise en charge généreusement par les OPCA est révolu. Gérer la formation, ce n’est plus gérer un budget connu à l’avance, mais justifier de ses coûts. Et pour justifier les dépenses, il va falloir rendre des comptes. D’accord, mais avec quels indicateurs ?

 

Redéfinir l’achèvement et à la réussite

Dans son format traditionnel (c’est à dire en salle), une formation est « terminée » quand tout le monde a quitté la salle, et « réussie » quand le formateur signe l’attestation après avoir posé quelques questions pour s’assurer que tout le monde a compris (un peu comme à l’école des fans). Par habitude plus que par analyse, ce sont les mêmes indicateurs qui ont été repris en formation à distance : pour qu’une formation soit achevée, il faut l’avoir consulté du début jusqu’à la fin, et pour qu’elle soit réussie, il faut avoir répondu à un quiz de fin de parcours. Cela paraît normal et logique.

Sauf qu’en salle, durant une formation de 2 ou 3 jours, l’attention fluctue selon l’intérêt, le niveau de fatigue, la motivation, la faim, l’ennui… et qu’un formateur n’a pas grand intérêt à faire échouer ses participants.

C’est d’une version idéalisée de la formation en salle qu’ont été transposés à distance ses indicateurs de réussite et d’achèvement. On est passé d’un certain laxisme à une exigence extrême. Ce qui explique en grande partie les arguments des détracteurs de la formation à distance : « c’est beaucoup moins efficace que la formation en salle », et les résistances des apprenants à se former en ligne au vu des efforts plus importants qu’ils doivent fournir.

Il faut donc redéfinir l’achèvement et la réussite d’une formation (qui ne soient plus une consultation exhaustive et un seuil de réussite élitiste), mais surtout re-concevoir le parcours de formation afin d’avoir de meilleurs éléments de mesure.

Il s’agit de procéder en plusieurs étapes :

  • re-découper les contenus en grains très fins (<30 minutes, idéalement 10 minutes)
  • faire qualifier les contenus par les experts selon les critères suivants :
    • niveau : sensibilisation, approfondissement, expertise ;
    • exigence : obligatoire, conseillé, facultatif ;
    • validation : connaissance, maîtrise, excellence ;
  • définir les dépendances entre les grains : pré-requis indispensable, chronologie souhaitée / chronologie libre ;
  • re-bâtir une organisation en modules et sous-modules (grains) en fonction de la qualification des experts et des dépendances ;
  • concevoir ou re-découper les séquences d’évaluation en fonction de la nouvelle organisation en modules (1 séquence de validation par module) ;
  • définir les contenus et le volume de contenu nécessaires pour considérer que la formation est « achevée » (sans exigence d’exhaustivité) ;
  • définir les évaluations et les résultats d’évaluation nécessaires pour considérer que la formation est « réussie » (sans exigence d’exhaustivité de réussite aux évaluations).

Il s’agit donc de passer d’une logique de mesure « exigeante » à une mesure « suffisante ».

 

Évaluer l’apprenant, la formation ou son effet ?

Ce que cherche (ou devrait chercher) principalement un responsable formation, ce n’est certainement pas que les apprenants soient des « bons élèves », ou que la formation soit appréciée, mais que l’action de formation permette d’atteindre les objectifs opérationnels visés : développer de nouvelles compétences, diminuer les anomalies, améliorer les résultats, la productivité…

Or, c’est bien souvent les résultats des apprenants qui sont utilisés pour déterminer si l’action de formation a été un succès. C’est un peu comme considérer qu’avoir son code de la route permet de garantir qu’on n’aura pas d’accident.

Certes, il faut mesurer la performance individuelle des apprenants, ainsi que la pertinence d’une formation, mais le plus important est de définir des indicateurs concrets, opérationnels et mesurables pour déterminer l’effet réel d’une formation.

Ce n’est pas simple, car il faut savoir relier les résultats réels et observables aux théoriques et restitués par les plateformes.

 

L’œil est plus pertinent que le clic

À qui faire confiance ? À la plateforme qui dit que la formation au nouveau produit n’a pas été un grand succès parce que seulement 60 % des apprenants l’ont achevée, ou au Directeur Commercial qui assure que ses ventes vont bientôt décoller, car les prises de rendez-vous augmentent ?

Qui a raison, le compteur de clic ou l’œil aiguisé et averti de l’expert ?

Et si tout simplement la formation était efficace, mais trop longue ?

Bien sûr, en bon mammifère séduit par le résultat sans effort, il est tentant de lire l’avenir dans un tableau de bord automatique plutôt que d’aller sonder le terrain, il faut alors assumer de passer à côté de la réalité et de prendre de mauvaises décisions.

Chers Responsables de Formation, les temps sont durs, et vont durer, préparez-vous à devoir rendre des comptes et défendre vos actions à vos directions. Armez-vous des bons indicateurs.

 

 

« En formation, chaque clic compte ! » — Christine Lagarde

 


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