Publié sur Economie matin le mercredi 8 janvier 2014

Maintenir ou développer son employablité est désormais de la responsabilité de chacun. On ne peut plus attendre de son employeur la solution unique à son développement de compétences personnel.

D’un côté, en effet, l’entreprise est confrontée à de telles exigences en matière de compétitivité et de retour sur investissement qu’elle ne peut plus se permettre d’investir en formation sur des compétences annexes à ses besoins propres. Pour préciser le trait, l’entreprise va investir son budget formation là où cela va pouvoir lui rapporter à court terme et pas nécessairement pour le développement du potentiel de ses collaborateurs.

Former sur ses produits, ses process, ses outils informatiques devient sa priorité immédiate.

De l’autre côté, le collaborateur dont les besoins de développement personnel se situent dans des compétences comportementales ou techniques dissonantes des besoins opérationnels et court-termistes de l’entreprise se trouve dans l’obligation d’entretenir et e développer son capital employabilité par ses propres moyens. La pression d’un marché du travail atone voire déliquescent ne faisant qu’imprimer plus de poids à cette exigence.

Ce qui pourrait être en soit une mauvaise nouvelle pourrait finalement se transformer en opportunité. On constate ainsi l’émergence en France d’un individu désormais concerné et impliqué dans ses investissements formation : de là à imaginer un marché de la formation comme objet de consommation il n’y a qu’un pas… que certains ont franchi. En effet sous l’impulsion de nos amis anglos-saxons des solutions permettant l’accès à la formation « tout au long de la vie » de manière autonome et s’appuyant sur les nouvelles technologies numériques se multiplient.

Plusieurs démarches sont possibles afin d’accéder en toute autonomie à la formation digitale

  1. La première est très proche d’une démarche d’accès à l’information à valeur ajoutée pédagogique. Ici au travers de moteurs de recherches et de requêtes ciblées sur son objectif de formation l’individu va pouvoir accéder à des centaines de ressources libres. Le savoir est là au bout de vos doigts. La masse de données a pour corolaires une perte de temps à trouver la bonne, un risque majeur quant à la fiabilité et la pertinence du contenu apporté (véracité), une multiplication des formats et souvent une certaine pauvreté qui pourraient en décourager plus d’un. L’accès volontaire et libre à de très nombreuses ressources pédagogiques qui sont à la disposition du picoreur que chacun peut être est à la fois une chance incroyable et un labyrinthe sans fin où le temps à chercher son chemin et la bonne ressource peut être plus important que le temps consacré à la consulter. Une forte capacité à l’autodidaxie et un discernement hors du commun sont des qualités essentielles pour faire son miel de ces ressources éparses. Fort heureusement quelques sites peuvent vous aider à sélectionner plus rapidement le contenu : les iTunes University, Ted ou Youtube sont des pourvoyeurs aux ressources innombrables, déjà classées et ordonnancées.
  2. Deuxième dimension plus structurée de l’apprentissage autonome via le numérique, le e-learning. Au sens de donner l’accès à des modules d’autoformation plus ou moins scénarisés et multimédia. Ces formats semblent rencontrer un réel intérêt pour l’individu consommateur de formation. La vague des tutoriels et des services d’autoformation en ligne comme tuto.com, vodeclic.com, demos.fr ou encore ingenium-elearning.com semble prouver que le marché est en train de se structurer. Mais cette fois-ci il va falloir sortir sa carte bleue. Les investissements de ces éditeurs pour créer et maintenir ces contenus sont en effet significatifs et la finalité est bien de les commercialiser. Ici plusieurs formules sont possibles d’e l’abonnement mensuel à moins de 10 euros HT avec « consommation illimitée de grains», au module à l’unité à 49 euros HT en passant par le parcours pédagogique complet à 350 euros HT. Un conseil : demandez à goûter l’offre avant d’acheter (test d’un module) pour ne pas être déçu à l’usage.
  3. La nouvelle dimension de l’apprentissage autonome en ligne plus en vue aujourd’hui est celle des MOOCs. Bien que parfois plus pauvre, elle vient revisiter les démarches pédagogiques du e-learning en y additionnant la dimension réseau collaboratif conjuguée à trois leviers de motivation pour l’individu : ce sont de prestigieuses écoles ou universités qui proposent leurs cours, c’est gratuit et enfin on peut potentiellement acquérir un certificat portant le label de l’institution. Prestige, gratuité, « certification »! Quand on sait combien la motivation est nécessaire dans un processus d’auto-formation, on voit bien ici les leviers apportés par les MOOCs. Du coup tout le monde se précipite pour être sûr de ne pas rater le train du MOOC et les initiatives fleurissent relayées à grande pompe par les plus hautes institutions gouvernementales avec notamment le lancement de FUN (France Université Numérique) qui comme son nom ne l’indique pas n’est pas une radio et n’est pas nécessairement drôle. Pas sûr que les MOOC français soient de taille à lutter avec ceux de leurs compétiteurs mondiaux du point de vue de l’image de l’institution en tous cas et donc de l’attrait.

L’auto-formation est donc en marche mais elle n’est pas la seule dimension que revêt la formation digitale. Il convient d’y inclure le champs du synchrone avec les solutions de classe virtuelle, la dimension du web 2.0 avec les apports de la collaboration de par l’usage des réseaux sociaux et des fonctionnalités de co-construction des savoirs, ou encore les approches 70/20/10 qui mettent en avant l’importance de l’acquisition des savoirs-informels.

Chaque mois lors des Learning Happy Hours que nous organisons nous confrontons ces nouvelles approches à la réalité et à la capacité d’anticipation raisonnée (on sait que le temps de l’innovation et de son acceptation est bien souvent un temps long) de dirigeants d’organismes de formation et de responsables de formation d’entreprise.

Nous constatons ensemble que non seulement la formation digitale vient offrir de très nombreux nouveaux formats possibles pour apprendre mais qu’elle nous oblige aussi à ré-inventer le présentiel (les formations en salle) pour le rendre plus percutant et faire de chaque moment de ce partage « physique » un moment d’exception magnifié par le numérique.

Par Philippe GIL — IL&DI – https://il-di.com

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