La pédagogie s’apprend-elle ?

Oui, elle s’apprend. C’est une discipline qui implique d’allier théories et pratique. La racine latine du mot « éduquer » est « ex ducere », « mener hors de » : c’est le rôle du pédagogue, qui doit conduire l’apprenant hors de son schéma de pensée, de ses croyances, et l’emmener plus loin. Le formateur n’est pas là pour déverser des connaissances, mais pour guider l’apprenant, en partant de son point de départ pour le guider vers ses propres réponses. Bien sûr, il n’y a pas de pédagogie sans connaissances ; mais former requiert également des compétences pratiques pour engager et embarquer l’apprenant dans sa propre trajectoire d’apprentissage.

A quelles conditions la technologie peut-elle améliorer l’efficacité des formations ?

Je ne crois pas en la technologie pour la technologie. Il y a des modes en la matière. Par exemple, quand les outils de quiz digitaux ont commencé à arriver sur le marché, il fallait, selon la « mode », absolument en ajouter dans toutes les formations, même quand ça n’était pas particulièrement pertinent. Ce n’est pas un bon usage de la technologie. Le quiz est un outil efficace dans certains contextes, mais s’il est juste là pour ajouter du « fun » sans s’intégrer dans le parcours d’apprentissage, il n’est pas efficace.

L’innovation consiste ainsi à associer des éléments connus d’une façon nouvelle. Nous avons la chance de vivre à une époque féconde en nouvelles technologies, qui élargissent le champ des possibles et des outils disponibles. Encore faut-il s’en emparer de façon créative.

Quelles approches vous apparaissent les plus prometteuses ?

Déjà, plutôt que d’interdire aux apprenants de se servir des IA comme ChatGPT, nous pouvons leur apprendre à s’en servir pour acquérir des compétences. Dans l’enseignement supérieur, de plus en plus d’étudiants utilisent l’IA pour rédiger leurs mémoires. Au lieu de traquer les contrevenants, je préfère évaluer la façon dont l’auteur du mémoire a employé l’IA : quels outils, quels prompts, quel esprit critique dans l’utilisation des résultats…

Mais il est possible d’aller plus loin, en particulier dans la formation en entreprise : utiliser les chatbots IA comme assistants pédagogiques. Les agents conversationnels en IA générative peuvent faire du tutorat, du mentorat, du coaching individualisé. Pour y parvenir, il est possible de partir d’agents conversationnels déjà existants ou de créer son propre bot qui sera ainsi mieux paramétré à ses propres besoins.

Il y a encore beaucoup de méconnaissance de l’IA dans le monde de la formation. Or, quand on sait l’utiliser, c’est une technologie très puissante, un véritable levier de productivité. Mais c’est aussi un outil qui arrive dans nos vies à une époque où nous sommes tous débordés : nous n’avons plus de temps. Il y a un investissement en temps à consentir au départ, et je crois qu’il est important de ne pas rater le coche. Plus le temps va passer, plus il sera difficile de se rattraper. Aujourd’hui, je peux vulgariser l’IA et former à l’art du prompt en 3 heures. Dans un an, ce sera peut-être plus difficile !

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