L’imagerie cérébrale par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf) permet de mieux comprendre le fonctionnement du cerveau, et en particulier d’identifier les bases cérébrales de notre motivation pour obtenir un gain monétaire, ou la réponse du cerveau engendrée lors de l’obtention d’un tel gain. Cependant, la mesure du signal enregistré en IRMf est indirectement liée à l’activité neuronale. Des chercheurs de l’Institut des sciences cognitives Marc Jeannerod et de l’hôpital neurologique de Lyon, sont parvenus à enregistrer directement, à partir d’électrodes implantées chez des patients épileptiques, l’activité électrique d’une région antérieure du cortex cérébral nommée le cortex orbitofrontal. Ils ont ainsi pu mettre en évidence trois types de signaux encodés dans cette région lors de l’anticipation et de la réception de gains monétaires. Cette étude est publiée dans la revue Brain.
Trois phases se succèdent dans le cerveau d’un sujet qui s’apprête à jouer (panneaux du haut) et chacune de ces phases est associée à des signaux distincts au sein du cortex orbitofrontal (panneaux du bas). La première phase est celle où le sujet prend connaissance de la somme qu’il peut gagner et de la probabilité qu’il a de gagner (a). Pendant cette phase, le cortex orbitofrontal encode la valeur subjective du gain potentiel (proportionnel à la chance de gagner). La deuxième phase d’anticipation (quand les rouleaux tournent) a une incertitude maximale lorsque la chance de gagner est de 1 chance sur 2. Pendant cette phase où le joueur attend le résultat, le cortex orbitofrontal encode l’incertitude de la récompense (b). La troisième phase correspond à l’obtention du résultat, qui confirme ou infirme les attentes du joueur (c). Cette dernière phase est également encodée au niveau du cortex orbitofrontal de façon transitoire.
© Jean-Michel Thiriet (panneaux du haut). “Dans l’enfer du jeu”. JC Dreher et al ; Cerveau et Psycho, n°60, 48-54 (2013)

Que se passe-t-il dans notre cerveau lorsqu’on joue à des machines à sous, entre le moment où les rouleaux commencent à tourner et le moment où le dernier rouleau s’arrête pour signaler un gain ou une perte ? Pour le savoir, des chercheurs de l’équipe “Neuroéconomie, prise de décision et récompense”, dirigée par Jean-Claude Dreher de l’Institut des Sciences Cognitives Marc Jeannerod ont analysé des signaux, émis par une zone spécifique, nommée cortex orbitofrontal. Cette région antérieure du cerveau est impliquée dans la prise de risque et l’apprentissage des associations stimuli-récompenses. Si un tel jeu de machine à sous a été utilisé, c’est pour mettre en évidence trois types de signaux distincts qui varient en fonction des chances de gagner et de l’incertitude lors de l’attente d’une récompense et lors la réception des gains.

Les mécanismes cérébraux sous-tendant l’apprentissage des associations entre stimuli et récompenses sont beaucoup étudiés chez l’homme et l’animal. Cependant, chez l’homme, un accès direct à l’enregistrement des potentiels de champs locaux (qui représentent la somme de toutes les excitations ou inhibitions synaptiques dans une région donnéeautourde l’électrode) enregistrés par des macroélectrodes profondes implantées, reste assez rare. Dans cette étude, une telle approche invasive a été utilisée chez des patients épileptiques résistants à la médication et pour lesquels une localisation précise des foyers épileptiques est nécessaire avant résection des foyers. Pendant la période où les patients restent à l’hôpital avec des électrodes implantées, il est possible de les soumettre à des tâches cognitives.


Figure: Localisation des contacts des électrodes chez 6 patients implantés dans le cortex orbitofrontal
© Jean-Claude Dreher

Les chercheurs montrent ainsi que le cortex orbitofrontal encode 3 types de signaux impliqués dans la représentation, l’anticipation et la réception des récompenses lors de l’apprentissage des association entre stimuli (machines à sous) et récompenses (gains monétaires). Un premier signal code la valeur subjective (c’est à dire notre estimation de notre chance de gagner avec cette machine) de la machine à sous lors de sa présentation (Fig.1a), suivi d’un signal qui est maximal lorsque la chance de gagner est de 1 sur 2 pendant la phase d’attente lorsque les rouleaux de la machine tournent (codage de l’incertitude) (Fig.1b). Enfin un dernier signal de cette région répond de façon transitoire lorsque le gain est reçu (Fig.1c). Tous ces signaux sont enregistrés lorsque les sujets apprennent à associer différentes machines à sous ayant différentes probabilités de gain, certaines machines étant plus “récompensantes” que d’autres.

Repéré depuis Le fonctionnement du cerveau quand on joue à des machines à sous

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