Le codesign se développe favorablement au sein des entreprises qui, guidées par la nécessité de travailler dans un monde VUCA et s’inspirant de méthodes Agile et Scrum de gestion de projet, ont su tirer le bénéfice d’une nouvelle organisation du travail.
Cette démarche vise à valoriser des échanges propices à la créativité entre des talents aux profils variés afin d’élaborer des produits et services innovants.
Si cette démarche a su s’adapter au monde de l’entreprise, elle reste encore en marge du monde de l’éducation alors que les volontés individuelles à collaborer sont de plus en plus nombreuses.
Le codesign, une démarche favorisée par l’entreprise
Le codesign permet la co-élaboration de produits et de services grâce au travail collaboratif et participatif de différents métiers de l’entreprise. C’est une démarche visant à concevoir un objet qu’il soit matériel ou immatériel en s’appuyant sur l’intelligence collective, agissant comme moteur de la valorisation des intelligences individuelles. Mais le codesign dépasse les seuls murs de l’entreprise et se démarque de la gestion de projet. En effet, le codesign trouve ses fondements dans les rapports entretenus dans la communauté qui met en interaction la créativité de talents multiples, techniciens et experts côtoyant ainsi de simples passionnés et usagers sous le regard des modérateurs et des administrateurs. Car le codesign a aujourd’hui dépassé la sphère des ateliers créatifs pour se développer sur l’espace qu’offre Internet et ses usages numériques.
Largement inspiré du Design Thinking dont l’émergence remonte aux années 2000 et que des personnages comme Tim Brown de l’agence Ideo ont su proposer comme une nouvelle alternative de démarche marketing, le codesign redéfinit le cadre d’élaboration des solutions innovantes. Il apporte une réflexion plus approfondie sur les possibilités mais aussi les limites d’un produit ou d’un service voire d’un concept grâce à l’apport des usagers et de chacun des métiers de l’entreprise. Le codesign déborde largement les ateliers de #Design Thinking car il s’agit là de valoriser la capacité d’innovation d’une communauté qui se nourrit elle-même et qui s’anime bien au-delà des attentes d’une seule organisation.
Ainsi l’émergence des idées et la discussion au travers des forums et plateformes collaboratifs permettent à ces échanges d’être producteurs de valeur d’autant qu’ils favorisent le partage d’informations et donc la diffusion de nouvelles pistes de réflexion. Bien sûr les données et informations générées au travers de ces échanges forment un formidable gisement créatif sur lequel l’entreprise s’appuie afin de les intégrer dans sa démarche stratégique et adapter ainsi son offre à un marché potentiel ou en évolution.
Cette nouvelle appréhension de l’organisation du travail et du management des métiers permet à l’entreprise de valoriser chacun de ses acteurs et de les inciter à construire les produits et services de demain.
Le codesign dans le monde éducatif, bientôt une réalité ?
Le monde éducatif peine à adopter une telle démarche. Cependant, on ne saurait trop lui conseiller de ne pas rester en reste ou tout du moins de l’expérimenter pour mieux l’apprécier. En effet, la mission éducative se doit de favoriser l’insertion des jeunes dans la société et le monde du travail. Le concept de codesign ne doit donc pas rester à la porte de l’école ni être un vœu pieu s’il l’on veut former les étudiants aux réalités du monde entrepreneurial.
Certaines écoles d’ingénieurs comme HEI, ISA et ISEN ont intégré dans leur parcours de formation cette démarche sous la forme d’ateliers internes qu’ils proposent de déployer au sein des entreprises. Reste à favoriser les partenariats entre écoles et entreprises afin de former les uns et d’injecter un sang neuf chez les autres. ceci passe aussi par repenser les curriculums des formations.
En matière éducative, on ne peut que constater une réelle difficulté à mettre en place de tels dispositifs. Manque de temps, résistance passive, peur de la récupération des productions intellectuelles, ampleur de la tâche,… les freins sont nombreux. L’intégration du codesign dans la communauté éducative nécessite de repenser en terme de curriculum et de mettre en place une politique éducative qui dépasserait les champs didactiques. Elle doit aussi s’accompagner de la mise à disposition et la #formation à des outils numériques, d’espaces d’échange et de FabLab. Ceci prendra nécessairement du temps afin de mobiliser les équipes éducatives et de trouver les moyens financiers au déploiement de politique de codesign.
Car une démarche de codesign ne se limite pas à la création de supports didactiques. La démarche dépasse le champ disciplinaire et intéresse de nombreux acteurs qui ne sont pas tous enseignants. Les objets ou supports créés doivent être pensés au-delà d’un grain pédagogique et s’organiser autour d’un espace dédié et pensé à accueillir ces interactions.
Cela suppose donc que les architectures des plateformes et les outils numériques proposés soient pensés en amont ainsi que les espaces de codesign numérique. Il est donc nécessaire pour que de tels chantiers puissent voire le jour que la démarche de codesign soit utilisée dans la conception même de la mise en œuvre de dispositifs reposant sur cette démarche.
Mettre en place une stratégie de codesign dans le monde de l’enseignement nécessite de faire appel à des spécialistes –peu nombreux- qui auront une vue d’ensemble, conscients des contraintes liées au domaine éducatif et institutionnel, et capables d’envisager à la fois les grandes orientations mais aussi et surtout les différents aspects opérationnels liés à sa mise en œuvre.
Reste qu’entretemps, le monde éducatif peut déjà se familiariser au Design Thinking ou au co-thinking…