De plus en plus d’entreprises investissent dans les métavers, voyant dans ces univers virtuels « l’internet de demain ». Des chercheurs dénoncent au contraire un fantasme technologique aux conséquences dramatiques pour l’environnement.

Ces « méta-univers » pourraient ainsi révolutionner de nombreux secteurs, des jeux vidéo à l’entraînement sportif en passant par le monde du travail.

« Les entreprises de la tech ne disent rien à ce sujet et personne ne les contraint à en parler. Pourtant, tout nous porte à croire que ce sera un gouffre énergétique », regrette Fabrice Flipo, philosophe des sciences et techniques et enseignant chercheur à l’Institut Mines-Télécom. En 2006, le journaliste économiste américain Nicholas Carr estimait déjà que la consommation moyenne d’un avatar sur Second Life — le premier métavers grand public, lancé en 2003 — était de 1752 kWh/ par an, soit à l’époque, celle d’un Brésilien moyen.

« L’émission de données ne pourra pas être compensée par l’amélioration de l’efficacité énergétique »

Plus préoccupant encore, le cabinet a calculé que le numérique représentait à lui seul « 40 % du budget Gaz à effet de serre (GES) soutenable d’un Européen », à savoir la quantité de CO₂ qu’il est possible d’émettre par personne si l’on souhaite limiter le réchauffement global des températures à + 1,5 degrés d’ici 2100.

Remplacement ou accumulation ?

Dans le milieu des nouvelles technologies, on voit justement dans les technologies immersives une nouvelle opportunité pour réaliser des économies d’énergie. « Nous sommes désormais en mesure de représenter virtuellement une personne avec très peu d’informations. L’impact sur la bande passante d’un avatar animé sera moins importante que le streaming vidéo qu’on connaît aujourd’hui », assure David Nahon, président d’AFXR, une association créée en 2019 qui représente près de 400 acteurs français des nouvelles technologies de l’information et de la communication. Un argument qui suppose que les métavers auront une fonction de remplacement par rapport aux autres plateformes comme Twitch, et pas un effet d’accumulation, qui additionnerait les dépenses énergétiques.

Ressources en tension

Mais le problème ne se situe pas tant dans les usages des métavers que dans la construction des outils qui lui permettent d’exister. « En France, la consommation électrique du numérique, ce n’est que 20 % de l’impact. L’essentiel du problème réside dans le coût en ressources de la fabrication de nos équipements », explique Frédéric Bordage, fondateur du cabinet Green IT. La construction des casques de réalité virtuelle nécessite, comme les smartphones, des dizaines de métaux comme le cuivre, l’or ou le lithium.

Ces ressources, dont certaines sont déjà en tension, risquent de faire l’objet de pénuries dans les prochaines années. Fin 2019, l’association Systèmes extractifs et Environnements (SystExt) estimait déjà que les tendances actuelles de consommation promettaient des augmentations comprises entre 300 % et 900 %.

« Au rythme actuel, il nous reste moins de 30 ans de numérique devant nous, alerte au contraire Frédéric Bordage. L’urgence, c’est de collectivement arbitrer les usages en nous demandant quoi faire avec les ressources disponibles. »

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Repéré depuis https://reporterre.net/Les-metavers-mondes-virtuels-pollution-reelle

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