Depuis quelques années, par de nombreux billets successifs, j’ai considéré la question de ce que j’ai décidé de ne nommer désormais que « les études supérieures ». Cette petite précaution oratoire est en réalité lourde de sens, puisqu’elle est à la base de l’ensemble de mon raisonnement exposé ci-dessous. Je ne dis pas « enseignement », je ne dis pas « instruction », je ne dis pas « #éducation », mais je dis « étude », en me réservant pour plus tard le soin de distinguer les connaissances et les compétences, et je me focalise sur une idée tout à fait essentielle, à savoir que, en ce qui concerne la fonction de transmission, la question de l’université (au sens large) n’est pas d’enseigner (pour les enseignants), mais d’apprendre, pour les étudiants.
Connaissances ou compétences
Avec de nombreux autres billets, j’ai montré ce que tout le monde sait, à savoir que les notions apprises en première année de licence sont souvent oubliées en troisième année pour la majorité des étudiants. (La preuve ? Je l’ai avec la majorité des étudiants qui viennent en stage et qui, en confiance, l’admettent ; d’ailleurs, souvent, ce n’est pas les années qui sont le cap de l’oubli, mais le partiel particulier où l’on teste ces acquisitions.) À quoi bon avoir appris, alors ? On sait aussi que trop souvent, les étudiants – et peut-être nous-mêmes – se limitent aux connaissances, au lieu d’aller jusqu’à l’acquisition de compétences. À quoi bon ? On sait que nos amphithéâtres contiennent une proportion d’étudiants qui viennent aussi – ou ne viennent d’ailleurs pas – se socialiser.
Les étudiants doivent apprendre, les professeurs enseigner
Les étudiants doivent donc apprendre. Que devient alors le rôle du professeur, si ce n’est plus d’enseigner ? Je propose de bien distinguer, dans le discours professoral classique, les valeurs, les notions et concepts, les méthodes, les informations, et les anecdotes. Peut-on imaginer que toutes ces catégories soient apprises, et non transmises oralement ? Pourquoi pas…
Réflexion collective
Ici, on aurait tort de penser que je critique mes collègues, car je suis moi-même l’un d’eux. Et c’est donc bien plutôt une réflexion collective que j’appelle de mes vœux. Nous avons assez joué à prétendre que l’enseignement était un art, dont les résultats ne pouvaient pas être évalués. Les expériences, dans l’enseignement du premier degré, sur l’enseignement de la lecture ont amplement monté la faillite des théories non évaluées. Nous devons évaluer quantitativement les résultats de nos dispositifs d’études supérieures, même si cela est difficile parce que le matériau est l’humain.
Repéré depuis Pourquoi et comment enseigner très différemment