Classe inversée, reverse mentoring, la pédagogie inversée
#Flipped classroom disent les américains. Rien à voir avec les aventures de Flipper le Dauphin ou les fameux billards électroniques qui faisaient la joie des cafés et des étudiants d’antan. Apprendre chez soi pour mettre en pratique en salle de cours. Flippant pour le #formateur ? La #pédagogie inversée a-t-elle un sens ? Voilà une question renversante qui va nous mettre sens dessus dessous. Alors oui n’étant pas avare de scénarii à rebondissements et la nature ayant horreur du vide nous allons nous pencher sur ce beau sujet. Ca va secouer à tous les étages.
Un chat peut en cacher un autre
Jean Vanderspelden, pince sans rire, fera le chat un fil rouge décalé de cette présentation renversée. Plus sérieusement, le terme flipped classroom se développe courant 2012. Depuis la démarche a fait le tour de la planète. On parle de #classe inversée, de #pédagogie inversée. Spécialiste de l’apprenance, sa démonstration repose sur un déplacement de sens où désormais il est nécessaire “d’explorer pour structurer “ des connaissances ou des savoirs.
1.
S’appuyer sur les méthodes actives
La classe inversée est un retour aux pédagogies actives. Le principe de classe inversée est simple. À la maison, l’enfant découvre la leçon au travers des documents, le plus souvent des petites capsules vidéo. Et en classe, la pédagogie active prend le relais au travers d’exercices ou d’expérience.
L’histoire commence aux États-Unis dans les années 2010. Alors que le lycée de Clintondale faisait partie des pires écoles en termes de résultats scolaires de l’état du Michigan, États-Unis, une initiative a littéralement changé la donne pour les élèves et leurs professeurs. Il va mettre en place avec 13 élèves en échec scolaire le principe de « classe inversée » pour un des cours de son établissement. Le résultat ? Époustouflant ! À la suite de cette première expérience, il systématise la #méthode pour tout le lycée.
https://www.dailymotion.com/#video/x2f89x0
On aurait trouvé la recette miracle ? En fait, la classe inversée revient à faire de la pédagogie active. Et ça, cela fait longtemps que ça existe. Quelques exemples donneront un bon aperçu de la chose.
La méthode d’enseignement de l’école mutuelle se développa en France de 1747 à 1830. Voici l’explication que donne Wikipédia “Dans l’école mutuelle, l’organisation est totalement différente des méthodes d’enseignement simultané qui prévalaient alors : un seul maître est nécessaire pour faire fonctionner une école jusqu’aux limites d’ordre architectural concernant la capacité d’accueil du bâtiment (jusqu’à plus de 800 élèves). Ce système peut fonctionner à plusieurs étages, avec des moniteurs généraux, des moniteurs intermédiaires, etc., jusqu’au niveau le plus bas des élèves débutants, tout le monde apprenant à son niveau et enseignant au niveau inférieur. Ainsi «Un enfant y trouve par définition toujours une place qui correspond à son niveau… Les moniteurs ne sont que provisoirement les premiers dans le précédent exercice de la même matière », et non pas les meilleurs élèves ou les plus âgés comme il sera de règle par la suite.” C’était très efficace, voire trop et ne répondant pas aux besoins de l’époque de la révolution industrielle et de son organisation militaire. Aujourd’hui, nous parlerions d’#apprentissage de pairs à pairs.
De même que Jean Piaget, David A. Kolb a une approche en 4 étapes qui s’approche de la classe inversée :
- le recours à l’expérience concrète,
- le passage à l’observation réfléchie,
- savoir conceptualiser et s’initier à l’abstraction
- passer au stade de l’expérimentation active, normalement dans cet ordre en un tour complet.
schéma tiré de Styles d’apprentissage : la typologie de Kolb
Rien de nouveau, sauf qu’elle a été longtemps mise de côté dans la #formation initiale.
2.
Redonner du SENS à la PRESENCE !
Redonner du sens à la présence !
Marcel Lebrun, professeur à l’Université de Louvain, est également un agitateur techno-pédagogique. Il anime avec Christophe Batier de Lyon 1 le #MOOC elearn2 Se former en ligne pour former en ligne.
À propos de classe inversée, Marcel Lebrun explique : “J’applique un grand principe de pédagogie, le principe de variété. C’est ça qui me parait important. Je crois qu’avec ces réagencements de l’enseigner et de l’apprendre, de la présence et de la distance, on a une variété très large de dispositifs qui sont possibles. Et qui sont en accords avec les compétences que doivent acquérir les étudiants. C’est-à-dire qu’ils sont capables d’aller chercher l’information, de travailler en équipe, de développer un appareil critique, etc. ”
L’enseignement se fait à distance et l’apprentissage se fait en présence. Cela réunit les notions de compétences, de méthodes actives et de #technologie. Ce n’est pas une méthode révolutionnaire, c’est une méthode évolutionnaire. Cette méthode nous libère du temps et de l’espace.
Jean Vanderspelden propose ainsi une vidéo de Marcel Lebrun qui permet d’illustrer le concept de « multimodalité » qui a tendance à se substituer (ou à ré-éclairer) celui de FOAD pour la Formation Continue en France : redonner du sens à la présence en s’appuyant sur la mise à distance (rendu possible par le #numérique), pas seulement des ressources, mais aussi, des interactions : classe inversée, #classe virtuelle, MOOC, Bibliothèque pédagogique, Centre de Ressources (APP, EPN, P@T, etc….) et tout autre dispositif hybride aux bénéfices des apprenants accompagnés.
Causerie à Clair2015 avec Annick Carter et Marcel Lebrun autour des classes inversées
3.
EXPLORER pour STRUCTURER
Explorer pour structurer
Jean Vanderspelden l’avoue sans peine, tout en autodérision. Il n’est pas à l’aise avec le numérique. La participation au MOOC Itypa (Internet tout y est pour apprendre) a été l’occasion de faire sa petite révolution copernicienne.
Le numérique impacte la formation de trois façons :
Le premier impact est du registre de la consultation et de la diffusion. Nous sommes passés de la lecture à la navigation changeant du même coup les registres culturels des apprenants. Au fur à mesure, les outils nous ont également permis de produire, publier, diffuser et partager. Nous sommes passés de la production personnelle d’écrits à « Vidéo, Image, mot et hyperlien… » vers le partage de iproductions collectives. C’est dans ce sens qu’il faut comprendre le terme de plurimédia.
Le second impact perturbe d’avantage le monde de la formation en faisant le pari de la capacité des gens à apprendre et à explorer avec une certaine autonomie. On passe du modèle dominant qui consiste à « Mémoriser pour hiérarchiser » vers un modèle plus agile et innovant qui consiste à « Explorer pour structurer ». L’effet sans doute du moteur de recherche qui sert désormais d’appendice à notre mémoire du quotidien.
Cela implique la capacité de collaborer. C’est même le nœud de la transformation en cours.
François Taddei, Biologiste, fondateur et directeur du Centre de recherches interdisciplinaires (CRI), a récemment été interviewé par le magazine en ligne Paristechrewiew. Il développe les nouvelles formes d’apprentissage basées sur la recherche mais également sur les logiques de coopétion, mélange de compétitions et de coopération. Le plus important dans ces formes de coopétition comme celle du MIT est que tous les étudiants doivent documenter en temps réel tout ce qu’ils font. Ces informations sont donc disponibles pour les autres, tout particulièrement pour les étudiants d’une année sur l’autre qui peuvent s’en servir pour aller toujours plus loin. C’est la création de ce que j’appelle des “écosystèmes d’apprentissage coopératif et d’innovation” : à chaque fois que quelqu’un a appris quelque chose, quelqu’un d’autre va pouvoir apprendre cette même chose plus facilement ; à chaque fois que quelqu’un a innové dans une dimension, quelqu’un d’autre va pouvoir innover dans la même dimension plus facilement.
vidéo : Interview de François TADDEI par Gérald DELABRE
Troisième impact enfin, le numérique offre du temps et de l’espace à l’infini pour interagir. Nous passons plus de temps devant notre téléphone que devant la télévision. La synchronisation entre les différents appareils (tablette, smartphone, ordinateur) qui nous entoure permet une expérience utilisateur renouvelée. C’est à l’organisation de se plier à ces nouveaux usages et non l’inverse. On dépasse le lieu où l’on apprend qui fige à une logique d’apprenance grâce aux interfaces numériques qui permettent de se former en mobilité de temps et de lieu.Même si ce phénomène est ancien, le numérique par sa synchronisation modernise le concept.
4.
De la formation vers l’APPRENANCE
De la formation vers l’apprenance
De fait, c’est l’apprenant désormais qui est pilote de son parcours et non l’institution. La personne peut désormais saisir toutes les opportunités d’apprentissage tout au long et tout au large de sa vie. C’est en ce sens où il faut reprendre la définition de l’apprenance de Philippe Carré : L’apprenance décrit un ensemble stable de dispositions affectives, cognitives et conatives, favorables à l’acte d’apprendre, dans toutes les situations formelles ou informelles, de façon expérientielle ou didactique, autodirigée ou non, intentionnelle ou fortuite. L’adjectif conatif (du latin conatus, — us : « effort, élan ; essai, entreprise ») indique ce qui a rapport à la conation, c’est-à-dire à un effort, une tendance, une volonté, une impulsion dirigée vers un passage à l’action.
Est-ce que l’apprenant se saisit de cette liberté retrouvée ? Rien n’est moins sûr. Il est nécessaire d’avoir un minimum d’outils pour apprendre à apprendre. Pour autant, le mouvement est lancé et les habitudes évoluent vers cette émancipation cognitive. L’institution entreprend une lente mutation numérique et l’individu développe sa propre culture numérique, plus collaborative.
5.
Les territoires de la PEDAGOGIE INVERSEE
Les territoires de la pédagogie inversée, du global au local
Il faut l’aborder en tant qu’écosystème mélangeant formel et informel, où chacun peut développer des parcours singuliers. Selon son histoire les lieux sont plus ou moins ouverts sur les territoires.
L’#éducation nationale et le supérieur essaient de s’ouvrir mais force est de constater que le changement se fait à la marge grâce à des professeurs volontaires. L’institution souffre, elle, d’immobilisme. D’autres sont des interfaces d’apprentissage de proximité ancrées dans le territoire. On pourra citer les APP (atelier Pédagogique Personnalisé), les tiers lieux, les fablabs ou encore les learning centers. C’est le cas également du mouvement de l’éducation populaire qui se réinvente au contact du numérique. Le point commun est un apprentissage par l’expérience. Les MOOC sont également des lieux qui créent de la porosité dans l’organisation puisque 80 % des participants sont des actifs.
Est-ce que le monde de la formation a pris conscience de la transformation en cours ? Pour Jean Vanderspelden, c’est clairement non. Pour lui, l’organisme de formation a une posture de rentier qui pense avant tout à remplir ses salles de stagiaires. Les formations consistent à enseigner puis à contrôler à partir de contenus standardisés. Bref, tout le contraire de ce qu’attendent les participants. Ceci expliquerait en partie la désaffection de la formation.
Il faut agir en barbare et conquérir les nouveaux territoires de l’apprenance et de la pédagogie inversée. Cela veut dire accompagner l’apprenant dans un parcours personnalisé en proposant des activités variées dans le temps et l’espace. Mais également en utilisant les MOOC, les #COOC et autres #SPOC.
C’est-à-dire en s’affranchissant des anciens standards de la formation. Parce que nous ne nous trompons pas. Les MOCC, au travers des SPOC, permettent de faire le grand écart entre le global et le local.
Histoire et définition des MOOCpar Mathieu Cisel
Connaissez-vous les ressources éducatives libres (REL) ? La définition de l’UNESCO est la suivante : « Des matériels d’enseignement, d’apprentissage et de recherche sur tout support, numérique ou autre, existant dans le domaine public ou publiés sous une licence ouverte permettant l’accès, l’utilisation, l’adaptation et la redistribution gratuites par d’autres, sans restrictions ou avec des restrictions limitées. Les licences ouvertes sont fondées dans le cadre existant du droit à la propriété intellectuelle, telle que définie par les conventions internationales concernées, et respectent la paternitéé́ de ’’œuvre » (Sourc : Forum de ’’UNESCO, 2002)
Or, ces ressources servent à la construction de MOOC. C’est donc un écosystème qui se développe où chaque ressource s’améliore au fur à mesure de son utilisation. Les REL reposent sur le cadre des 4R, tel que l’explique David Wiley dans son article””L’ouverture comme catalyseur pour une réforme de l’éducatio” :
- Réutiliser
- Réviser
- Remixer
- Redistribuer
Imaginons que toutes les ressources soient libres d’accès. C’est bien la pédagogie et la capacité à animer l’apprenance qui sera la valeur ajoutée. Or, c’est bien ce qui se passe avec Internet. Pour exemple, la Khan Academy propose des milliers de capsule sur les mathématiques, favorisant des parcours adaptés aux attentes de chaque apprenant.
6.
La REFORME change la donne
La réforme change la donne
Avec la réforme de la formation continue, cela change tout. .A la lecture du décret du 20 août 2014, un adulte peut apprendre SANS la présence CONTINUE de son formateur ! explique Jean Vanderspelden. C’est la reconnaissance implicite du concept clé d’#autoformation accompagnée.
Intervention de Jean-Pierre Willem sur les nouvelles règles des formations à distance
La FOAD devient une modalité reconnue et privilégiée. On passe d’une logique de «Présence e» à notion «d’Assiduité é ; on ne parle plus de «Durée de formation n» mais de «Forfait t» associé à un objectif. Cela veut dire que nous rentrons dans la définition stricto sensu de la FOAD. Une action FOAD est formation séquentielle : avec un programme, un objectif, des prérequis et des modalités définies. Et ça, c’est une révolution que les professionnels attendent… depuis 2001
Il reste tout à faire : changer les mentalités, s’autoriser à innover, rendre la formation plus active, s’approprier les usages et la culture numérique, construire des parcours certifiant, réinventer le blended learning à l’aune des MOOC. Bref, l’aventure ne fait que commencer.
7. Webographie
La classe inversée en 5 épisodes
Une série de 5 articles écrtss par Elodie Lestonat pour Thot Cursu. .A la base réservss aux abonnés de ’’édition professionnelle, ces articles sont désormais tous en accès libre : https://storify.com/thot/la-classe-inversee
Créez votre plate-forme de capsules vidéos, audios, textes
La plate-forme Mediacore est très complète, vous trouverez tous les outils pour proposer aux internautes vos vidéosYouTtube, vimeo, dailymotion … ou vos propres vidéos. https://digital-learning-academy.com/creez-votre-plate-forme-de-capsules-videos-audios-textes-pour-classe-inversee-ou-pour-un-usage-dapprentissage-mixte/
Tout ce que l’on ne vous dit pas sur la classe inversée
Après un premier essai de mise en place d’ateliers fonctionnant sous la démarche des APP (apprentissage par problème ou APP), ils ont constaté que même cette pédagogie innovante pouvait lasser les étudiants, parce que trop impliquante, parce qu’allant à l’encontre des habitudes, parce que le travail en groupe exigé prenait trop de temps, aux étudiants comme aux professeurs.
https://digital-learning-academy.com/tout-ce-que-lon-ne-vous-dit-pas-sur-la-classe-inversee/
Conclusion
La classe inversée est une des modalités de l’hybridation de la formation continue. Elle donne à enrichir le blended learning qui se pense dans un continuum d’actions. Pour autant, cela demande un engagement plus fort de la part du formateur comme de l’apprenant. Imaginons une pédagogie renversée au service de l’entreprise
Le formateur, producteur de capsules sexy, diffuse de petites videos (5 à 10 minutes max) sur le réseau social de l’entreprise. Il invite les participants à des ateliers pratiques de deux heures, intense en activités personnalisés. Pour renforcer la mémorisation, ils seront répétés dans le temps. Et selon leur profil, les participants pourront approfondir tel ou tel sujet en devenant eux-mêmes producteur de capsules. Des simulateurs et autres #serious game permettront de valider la maîtrise de la pratique.
Bref, faut pas flipper… mais plonger. La seule limite à la pédagogie est notre imagination. Reste à garder le rythme.