1.
Produire en interne ou sous-traiter ?

2.
L’expert sous son meilleur profil

3.
Workflow et CMS : internaliser une production de masse

4.
Focus sur le contenu : quelques règles simples

5.
A l’heure du choix

73 % des entreprises recourent à un prestataire pour produire des ressources pédagogiques digitales sur mesure et 68 % en créent en interne. Ce constat du Benchmark Européen du Digital Learning 2016 réalisé par Crossknwoledge et Féfaur, démontre un équilibre entre production interne et production externe de contenus sur mesure.

Quant au « sur-étagère », il s’impose également dans les parcours de formations en ligne avec 68 % d’entreprises utilisatrices.

Qu’elle opte pour une production interne ou externalisée, sur mesure ou plus transverse, l’entreprise doit, via son service formation et avant toute opération de création de contenus, définir tous les paramètres (objectif, cible, langues, volumes…) et le workflow qui permettront de pérenniser ces ressources pour en faire un véritable patrimoine pédagogique, réutilisable au fil des ans et évolutif au gré des transformations des métiers de l’entreprise ou des données économiques, légales, normatives…

Initier un processus d’industrialisation de la production et de la gestion des ressources pédagogiques permet une production en masse et la gestion de l’obsolescence des contenus.

1.
Produire en interne ou sous-traiter ?

L’acculturation au digital learning est en passe d’être acquise. Les entreprises, poussées par des enjeux et donc des besoins croissants de formation de leurs collaborateurs, perçoivent désormais les atouts de la formation en ligne. Dans ce contexte de développement des pratiques d’acquisition de connaissances en ligne, la nécessité de produire en continu et en volume des contenus, s’accroît. La question du mode de production des ressources pédagogiques multimédia devient ainsi cruciale.

Selon la taille de l’entreprise, le volume de contenus de formation dont elle dispose déjà, les thématiques formation les plus importantes pour l’activité (formation aux process de l’entreprise, acquisition de gestes techniques, développement personnel des managers…), la stratégie pourra varier. Se lancer dans la création de contenus multimédia va sans doute nécessiter un mix entre production interne et sous-traitance si l’on souhaite jouer l’effet volume à court terme.

Sous-traiter la production de contenus digital learning sur mesure auprès de professionnels rime souvent avec qualité pédagogique, haut degré d’interactivité et mix des formats. Le coût du parcours réalisé en externe est en revanche généralement plus élevé qu’une production en interne. Cette notion de coût est toutefois à nuancer : la nécessité de constituer une équipe en interne, formée à la réalisation de ressources pédagogiques en cas d’une production internalisée génère un coût interne qui peut s’avérer substantiel.

L’utilisation des ressources pédagogiques externes passe aussi par l’acquisition et l’intégration de modules « sur-étagère » dans les parcours en ligne. L’offre désormais très large sur le marché permet de répondre à des besoins d’acquisition de compétences plus transverses et ne nécessitant pas de contextualisation à l’activité de l’entreprise. Ainsi les modules « sur-étagère » de langues, de bureautique, de développement personnel sont-ils très présents dans les dispositifs de formation digitale des entreprises. Leur coût à l’utilisateur permet généralement de rationnaliser la production de contenus et de concentrer l’investissement (qu’il soit interne ou externe) sur des modules à forte valeur ajoutée pour la montée en compétences des collaborateurs.

Produire des contenus pédagogiques distanciels en interne présente l’avantage de rester maître de ses contenus, de leur mise à jour et d’associer plus étroitement les experts métier au projet. Enfin, bien organisée, la production interne favorise la réactivité lors de la création ou de l’adaptation des ressources. En effet, le circuit de validation est généralement plus court en interne et évite de nombreux aller-retour avec le prestataire.

Positionner l’entreprise dans une démarche de constitution d’un véritable patrimoine pédagogique revient à considérer le contenu de formation digitale comme un actif qu’il convient de gérer et d’adapter aux évolutions des métiers et des process de l’entreprise. En cela, l’internalisation peut se révéler un atout.

Choisir entre production interne et production externe est une décision qui se mûrit en fonction de nombreuses contraintes organisationnelles et temporelles de l’entreprise :

  • quelle est l’urgence de la production de contenus rapportée au volume à produire ?
    combien de collaborateurs peuvent être affectés à la production ?
  • quel est le budget alloué à l’opération ?
  • quel est le degré de médiatisation et d’interactivité souhaité (texte simple, texte enrichi, vidéos enrichies, podcasts, réalité augmentée ou réalité virtuelle) ?
  • quel est le degré estimé d’obsolescence des connaissances qui vont être transmises (par exemple, les règles fiscales présentent un degré d’obsolescence supérieur aux bonnes pratiques d’accueil du client) ?
  • sur quels types de supports les contenus seront-ils accessibles (ordinateur, smartphone, tablette, papier) ?
  • sur quelle plateforme (LMS, portail web…) le contenu va-t-il être diffusé ? Cette dernière interrogation et non des moindres pose la question du respect, par la ressource pédagogique produite, des normes (AICC, SCORM, xAPI ?) utilisées par le LMS sur lequel va être diffusé le contenu.

De façon schématique, le « sur-étagère » est plus efficient en terme de délai de production puisque la ressource existe déjà. Dans ce cas, l’abonnement à un catalogue de ressources permet en outre de gérer de façon efficace le risque d’obsolescence des contenus, la mise à jour étant réalisée par le prestataire producteur des ressources.

Le choix entre production interne et externalisation dans le cadre de modules « sur-mesure » en terme de délai est fonction des équipes présentes dans l’entreprise, du volume de contenus déjà existants et réutilisables. En terme de gestion de l’actualisation des contenus, l’internalisation permet souvent une meilleure réactivité. En terme de budget, le niveau d’interactivité souhaité est une variable fondamentale.

Chaque contrainte se combine à l’autre et les éléments de choix varient en fonction de la taille de l’entreprise, de la stratégie du service formation, des contenus déjà produits en interne…
Toutefois de façon simplifiée, on peut résumer les avantages de chaque formule dans un schéma :

Sur la question du respect des normes utilisées par la plateforme de diffusion de la formation (LMS), nombre d’outils auteur respectent ces normes, même un simple Power Point peut être converti au format SCORM par l’intermédiaire d’un plug-in ajouté à Power Point. Encore faut-il s’assurer de cette compatibilité pour éviter toute déconvenue au moment de la diffusion. Avec une production externalisée auprès d’un prestataire spécialisé, peu de risque d’incompatibilité. En matière de sur-étagère, mieux vaut vérifier auprès de votre fournisseur. Enfin dans le cadre d’une production de contenus en interne, le choix de l’outil auteur doit tenir compte de cette contrainte.

2.
L’expert sous son meilleur profil

Dans tous les cas, production interne ou externalisation, le rôle de l’expert métier va s’avérer central. Son choix ne doit pas être laissé au hasard et son accompagnement constituera un facteur clé de la pertinence des contenus produits.

Les experts métiers devront être identifiés en amont et sollicités dès le début du projet. On constate souvent que l’expert n’a pas reçu un brief clair et perçoit mal l’enjeu de son apport. Il est pourtant le garant de la pertinence des savoirs, savoir-faire et/ou savoir-être à transmettre.

Le dialogue avec l’expert métier prend du temps. Ce dernier doit appréhender clairement le message, le geste, la posture qu’il va devoir expliquer. Il doit avoir conscience du temps qu’il va devoir consacrer à cette mission. A défaut, il regardera son intervention dans le projet comme une tâche à accomplir à ses heures perdues entre deux réunions. Cet état d’esprit constitue un frein majeur à sa motivation et un risque de voir la production ralentie voire stoppée. Le risque d’erreurs, d’omissions ou d’imprécisions est en outre important dans cette configuration. Associer un expert à la création de contenus de formation oblige à lui dégager le temps nécessaire pour remplir sa mission. Le projet de création de contenus n’est pas « en plus ».

Choisir un bon expert revient donc à arbitrer entre plusieurs variables :

  • sa compétence technique ET pédagogique : vaut-il mieux le meilleur des experts quelle que soit sa capacité à expliquer et à transmettre son savoir-faire ou un bon expert qui, sans être le meilleur, aura déjà l’habitude ou l’appétence d’expliquer aux nouveaux embauchés les méthodes, process, gestes, etc. ?
  • sa disponibilité : un expert déjà sur-sollicité dans son cœur de métier n’aura pas le temps de se consacrer pleinement au projet et va donc « déprioriser » la création de contenus au profit d’activités directement liées à l’atteinte de ses objectifs ;
  • sa capacité à gérer le stress d’une caméra et à recommencer une démonstration plusieurs fois en cas de production de ressources vidéos (ne sous-estimez pas la fatigue et la tension que génère une prestation face caméra) ;
  • son endurance : le projet peut s’étaler sur une période de plusieurs semaines, voire plusieurs mois, l’expert métier devra se sentir intégré au projet dans la durée afin d’éviter une lassitude et une perte d’efficience au moment de la recette ou de la validation des éléments produits.

Le rôle du chef de projet et de l’ensemble de l’équipe pédagogique auprès de l’expert et de son manager (celui avec lequel il va falloir négocier l’affectation de son expert métier sur le projet) est fondamental. C’est à eux qu’il appartient de briefer l’expert, de détailler ses missions et leur durée, de replacer le projet dans son contexte et de lui permettre de prendre conscience de l’enjeu pour l’entreprise tout entière. N’hésitez pas à lui présenter des exemples de modules existants afin qu’il puisse se projeter dans les attentes.

En cours de production, l’équipe projet devra accompagner l’expert pour expliquer les choix pédagogiques et maintenir intacte sa motivation. Il n’est rien de pire pour le projet qu’un expert qui pense que finalement son apport n’est qu’accessoire puisque son discours ou ses démonstrations sont modifiés en permanence. A l’inverse, l’expert métier ne doit pas devenir le chef de projet et dicter à l’équipe projet les choix pédagogiques, sauf si… l’expert produit lui-même et tout seul le contenu !

La pédagogie vis-à-vis de l’expert n’est donc pas moins importante que celle destinée aux apprenants. Prenez le temps de faire un retour à l’expert sur chacune de ses productions en lui montrant les écarts entre ce qu’il a réalisé et les attendus pédagogiques. N’oubliez pas de le remercier de ses efforts après chaque livraison importante.

User Generated Content : l’expert nouvelle génération

Nous avons examiné notre expert métier dans un environnement classique de production de contenus digital learning. Mais depuis quelque temps émerge un concept nouveau : le User Generated Content, ou lorsque le collaborateur/apprenant devient l’expert/formateur. Dans ce contexte, tout apprenant peut, grâce à son smartphone, enregistrer une courte séquence vidéo ou audio sur un thème, un savoir ou un savoir-faire identifié comme un besoin de formation de ses pairs ou d’autres collaborateurs de l’entreprise. Il peut également devenir curateur de contenus pour la communauté.

Les plateformes collaboratives permettent aujourd’hui d’agréger du contenu de source externe et notamment du contenu créé par l’apprenant lui-même pour nourrir la connaissance ou la réflexion de ses pairs. La validation du contenu est réalisée directement par la communauté apprenante sur la plateforme collaborative par le biais de vote, de discussion autour du contenu mis à disposition par les collaborateurs.

Le User Generated Content ou devrait-on ici parler de Learner Generated Content, améliore l’engagement en formation puisqu’il devient l’expert et donc co-constructeur de son savoir et de celui de la communauté apprenante. C’est aussi une façon de bénéficier d’un apprentissage plus informel, celui de l’expérience vécue par l’un de ses pairs et raconté par lui, avec son ressenti, ses émotions… Et l’expérience montre que l’apprentissage informel se révèle plus riche et se retient plus facilement qu’un apprentissage très formel et très formaté.

Le User Generated Content est enfin un vecteur de développement de l’organisation apprenante qui favorise l’acquisition de connaissance en continu par le biais d’échange ou de curation de contenus par les collaborateurs pour les collaborateurs.

3.
Workflow et CMS : internaliser une production de masse

La production de contenus obéit à un workflow propre à l’organisation de l’entreprise, dans lequel l’expert occupe une place de choix. Mais il n’est pas le seul acteur de la chaîne de production. Réaliser du contenu digital learning implique nombre d’intervenants dont le rôle et la place dans le projet doivent être aussi précis que possible. Toute la chaîne de production doit être analysée et conceptualisée en amont, surtout si création et gestion sont internalisés et passent par un outil de gestion de contenu (CMS – content management system, en anglais) pour une industrialisation des process.

Dans une optique d’industrialisation des process, internaliser la production d’importants volumes de contenus passe par l’utilisation d’un outil dédié : le CMS ou content management system.

Inspiré des pratiques de la GED (gestion électronique des documents), le CMS permet de créer puis de gérer (actualiser, modifier, enrichir) les contenus produits et d’obtenir différents formats de sortie (print, web, e-book…). Tous les CMS offrent diverses fonctionnalités de base :

  • création de contenu en séparant le fond et la forme ;
  • stockage et gestion des contenus (textes, vidéos, audios, images enrichies…) ;
  • validation des productions avant publication ;
  • indexation des informations grâce aux métadonnées (catégories à définir en amont) pour une réutilisation ultérieure, une gestion fine de l’obsolescence des contenus et du besoin d’actualisation ;
  • versionning des documents et archivages ;
  • administration du workflow et des droits de chaque profil d’intervenant dans le projet.

Ces fonctionnalités peuvent généralement être personnalisées en fonction du workflow et des méthodes de travail propres à l’équipe pédagogique. Le travail de formalisation de la chaîne de production constitue une étape préalable dans la mise en place d’un outil de gestion de contenu. Une mauvaise définition des tâches et de leur enchaînement logique, une identification approximative du rôle de chaque acteur du projet peuvent conduire à des blocages et à une perte de temps conséquente.

Le travail préparatoire au déploiement d’un outil de gestion de contenu est donc conséquent et déterminant. Il se fait de concert avec l’éditeur de la solution. Il n’est pas rare que cette étape mette en lumière des disfonctionnements dans le workflow interne, dans la définition des rôles de chacun ou fasse émerger des besoins de profils non encore présents dans l’équipe.

Cet exemple de worklow se limite au séquencement des tâches et des intervenants dans le CMS, l’équipe pédagogique aura au préalable conçu l’ingénierie pédagogique du parcours, définit la granularité des contenus et réalisé leur scénarisation.

En outre, une absence de formalisation des différents contenus types (les fondamentaux, les exemples, les « en savoir plus »,…), de leur format (vidéos, audios, HTML, PDF, e-Book) et de leur structure (volume approximatif par type, charte éditoriale et partis pris) conduira à une perte de cohérence éditoriale pour l’apprenant et à un ralentissement des process de production interne.

4.
Focus sur le contenu : quelques règles simples

Se lancer dans la production de masse de contenus digital learning suppose une réflexion sur l’industrialisation du process non seulement de création mais aussi d’actualisation et de localisation (traduction et adaptation du contenu en fonction de la culture et des règles du pays) le cas échéant.

Se doter d’un CMS permet de déployer et de gérer les principes définis en matière de création de contenus. En matière d’industrialisation des process de création de contenus, il existe quelques règles incontournables qui rationnalisent le temps et les efforts de production et d’actualisation.

1. Séparer le fond de la forme

Le contenu reste indépendant de sa présentation. Des templates (modèles de présentation) peuvent être facilement créés dans un outil de gestion de contenu pour définir une présentation type dans un parcours donné. Les templates peuvent varier selon les parcours, selon les enseignes, selon les pays… Le contenu reste donc unique ce qui facilite et allège sa modification et son actualisation. En outre, un contenu brut (non mis en forme) sera plus facilement exportable vers un autre système de gestion en cas de changement d’outil.

Enfin, cette distinction fond/forme permet de séparer les rôles au sein du CMS et gagner en temps de production avec pour chaque tâche (création du fond et mise en forme), un ou plusieurs acteur(s) dédié(s).

2. Granulariser

Cette dissociation forme/fond couplée à une granularisation fine des contenus constitue un atout pour repackager des parcours personnalisés. Si chaque grain de contenu est caractérisé par sa finalité ou son niveau (savoirs fondamentaux, « en savoir plus », exemples, niveau débutant, niveau intermédiaire, niveau expert…), les possibilités de parcours personnalisés sont multiples. Ainsi sur un public débutant présentera-t-on avant tout les fondamentaux et les exemples, alors que les experts bénéficieront des grains « en savoir plus » pour approfondir leurs savoirs ou savoir-faire. Des grains « contextualisés » (par niveau, par pays, par profil d’apprenants, par métier) peuvent ainsi rationnaliser et accélérer la création d’un véritable catalogue de formation en ligne.

3. Qualifier les contenus

Chaque grain de contenu doit être indexé et qualifié dans une optique de réutilisation ultérieure, d’actualisation future. Des champs de métadonnées sont présents dans la plupart des outils de gestion de contenu. Ils peuvent être enrichis selon les besoins de l’entreprise. A minima, chaque contenu doit contenir des mots clés permettant de le retrouver, une date de création, le format. La richesse des métadonnées peut faciliter l’exploitation multiple des contenus. Toutefois multiplier les champs risque également de devenir chronophage et de décourager le concepteur qui pourra avoir le sentiment de passer plus de temps à qualifier le contenu qu’à le créer. Tout est donc question de dosage et de définition des besoins.

4. Adopter un niveau de médiatisation et d’interactivité adapté

En la matière, le mieux est définitivement l’ennemi du bien. Sauf à disposer d’une équipe dotée de l’ensemble des profils techno-pédagogiques, il vaut mieux rester simple. Un schéma bien pensé et signifiant est préférable à une animation sophistiquée nécessitant des heures de conception et de réalisation et qui demandera sans doute un travail supplémentaire lors de sa mise à jour ou de sa localisation.

Soyez conscient des moyens humain et matériel dont vous disposez et ne cherchez pas ailleurs en pleine phase de production. Si l’animation complexe semble indispensable, mieux vaut externaliser sa réalisation en travaillant bien en amont le cahier des charges.

5.
A l’heure du choix

Entre produire en interne des contenus sur-mesure, externaliser ou utiliser des contenus « sur-étagère » du marché, il n’existe ni bon ni mauvais choix. Tout est fonction de l’objectif, des délais, du budget et de la stratégie à moyen et long terme de l’entreprise.

La constitution d’un véritable patrimoine pédagogique à long terme passe par la maîtrise du processus de production et de gestion du contenu et donc plutôt par une production en interne. Les opérations de formation sur-mesure « one shot » peuvent passer par une production externe. Les langues ou la maîtrise des logiciels standards du marché en « sur-étagère » sont une solution fiable dans la mesure où ces compétences ne sont pas directement le cœur de métier de l’entreprise.