Peut-on encore passer à côté ? Quel que soit l’outil, quelle que soit l’industrie, le dictat pourrait bien se résumer à « Si tu n’as pas intégré l’IA en 2024, tu as raté ta vie/ta proposition de valeur ».
Les plateformes de planification, de gestion, de diffusion et d’optimisation de la formation ne font pas exception. LMS (Learning Management Systems), LXP (Learning Experience Platforms) TMS (Training Management Systems) sont progressivement en train d’intégrer l’IA dans leurs services pour maximiser l’expérience apprenant, individualiser les parcours, optimiser les sessions et analyser les datas. Si les IA, notamment génératives, ont de réels atouts à faire valoir et des gains de productivité à proposer, elles ont aussi un coût financier, technologique, organisationnel.
Comment opérer cette évolution en donnant du sens et de la valeur aux multiples cas d’usage sans mettre à mal son business model ? L’intégration des IA génératives va-t-elle conduire à une convergence plus forte des différents types de plateformes et de leurs services permettant à chacune d’enrichir ses fonctionnalités pour développer son périmètre ?
1. Visite guidée
L’évolution des plateformes LMS, LXP, et TMS est désormais au cœur de stratégies pédagogiques avancées et innovantes, adaptées aux besoins spécifiques des entreprises et des apprenants. Quelques cas d’usage pour appréhender la valeur ajoutée des nouveaux outils d’IA générative.
LMS et LCMS : faire plus en moins de temps
Les plateformes LMS (Learning Management Systems) et LCMS (Learning Content Management Systems) restent incontournables dans le paysage du digital learning. L’intégration de l’intelligence artificielle permet d’optimiser et de personnaliser les fonctionnalités existantes et de bâtir des parcours pédagogiques personnalisés aux besoins des entreprises et de leurs apprenants.
Ingénierie et conception
- Structuration des parcours : les IA génératives constituent une aide précieuse dans la définition des ingénieries des formations. A partir d’un contexte, d’une cible, d’un niveau, des objectifs (encore mieux d’un référentiel de compétences), le gain de temps consacré à l’architecture pédagogique de la formation avoisine les 50%. L’IA peut également amener des angles de traitement originaux et adaptés à la cible.
Attention : il est impératif de conserver un esprit critique vis-à-vis des productions des IA génératives et de les retravailler systématiquement. Encore aujourd’hui, les IA génératives peuvent « halluciner » !
- Contextualisation des parcours : L’IA peut analyser les compétences requises pour un secteur d’activité, un poste précis ou un objectif individuel et contextualiser et personnaliser le parcours d’apprentissage en conséquence.
Attention : cet usage nécessite une bonne gestion des différentes versions contextualisées d’un même parcours et une granularisation des ressources pour mutualiser les contenus génériques et optimiser les actualisations et évolutions.
- Création de contenus : l’industrialisation de la production de ressources pédagogiques pluri-format ou multilingue est désormais accessible dans des délais optimisés. Les IA génératives, outre leur accompagnement à la création des premiers jets de contenus, permettent de produire simultanément les mêmes contenus sous des formats alternatifs, dans des versions linguistiques variées. Ainsi en matière de vidéos pédagogiques, les IA génératives peuvent-elles cloner la voix d’un expert et opérer une synchronisation labiale pour rendre ses explications accessibles de façon transparente à tous les apprenants quels que soient leur langue ou leur contexte d’apprentissage.
Attention : cela ne va pas sans poser des problèmes de droits à l’image et de droits de propriété intellectuelle. Mieux vaut être prêt à négocier !
- Actualisation des contenus : Un autre aspect crucial est la mise à jour des ressources pédagogiques pour les maintenir pertinentes. L’IA peut automatiser une veille ciblée sur certaines ressources et proposer, en quasi temps réel les évolutions ou les ajouts dans les contenus déjà produits.
Attention : cette automatisation nécessite de formaliser avec précision la gestion des différentes versions de contenus pour éviter qu’un apprenant qui a débuté sur une version de contenu ne se retrouve sur une ressource actualisée sans avertissement et perde sa progression et la cohérence des évaluations déjà réalisées.
Le mieux est parfois l’ennemi du bien !
Fonction tutorale
Les systèmes augmentés par l’IA peuvent enrichir la fonction tutorale et proposer un accompagnement de premier niveau 24/7.
- Adaptation dynamique du contenu : L’IA peut analyser les interactions des apprenants avec les différentes ressources pédagogiques et ajuster le parcours en temps réel. Un apprenant rencontre des difficultés ? L’IA peut proposer des exercices supplémentaires ou des explications détaillées sous un angle différent. Pour les apprenants les plus avancés, elle peut orienter vers des ressources de niveau supérieur ou des thématiques connexes qui leur permettront de prendre de la hauteur ou d’embrasser un champ d’expertise plus large.
- Feedback immédiat : L’un des atouts majeurs de l’IA est sa capacité à offrir un feedback en temps réel. Après un quiz, elle analyse les réponses, identifie les erreurs, et propose immédiatement des ressources pour combler les lacunes. Ce soutien constant optimise la courbe d’apprentissage, la rétention des connaissances et l’engagement de l’apprenant.
- Tutorat de premier niveau : Pour lever les freins de compréhension, les IA génératives, intégrées sous formes de chatbots par exemple, peuvent entamer un dialogue avec l’apprenant et lui apporter des éléments de compréhension, des exemples pratiques, des angles de vue, propres à assurer une meilleure appropriation des notions, concepts, méthodes…
Attention : le tutorat par IA ne remplace pas le tutorat xhumain mais permet au tuteur de se concentrer sur un accompagnement à plus forte valeur ajoutée, contextualisé à une problématique spécifique, orienté vers la motivation et l’organisation des apprentissages, focalisé sur la réflexion de l’apprenant…
Rester maître du jeu !
LXP : l’expérience ré-augmentée
La promesse des LXP ? Placer l’apprenant au centre de ses apprentissages, personnaliser l’expérience et renforcer l’interactivité et les interactions sociales. Dans ce cadre, l’IA, déjà présente dans l’analyse prédictive du comportement de l’apprenant depuis plusieurs années, permet d’améliorer les recommandations, de fluidifier les relations entre pairs et de contextualiser les ressources aux besoins précis d’un apprenant.
Du côté apprenant
- Personnalisation et recommandations : L’IA analyse les intérêts, comportements, et besoins des apprenants pour proposer des contenus (vidéos, articles, ressources externes en ligne) qui correspondent précisément à leurs attentes. L’individualisation du parcours garantit ainsi un engagement et un impact maximisés.
Attention : il est primordial d’éviter la surcharge cognitive de l’apprenant. Si l’IA propose trop de contenus ou des recommandations trop fréquentes, cela peut submerger l’apprenant. Il est important de configurer les algorithmes de recommandation pour équilibrer la quantité de suggestions, leur fréquence et leur pertinence.
De même, il est fondamental de surveiller les biais algorithmiques. Les recommandations doivent être testées et monitorées pour s’assurer qu’elles ne comportent pas de biais ou qu’elles ne renforcent pas uniquement les préférences déjà existantes, ce qui pourrait limiter le conflit socio-cognitif moteur de l’apprentissage et de la transposition en situation de travail.
Mesure et tempérance !
- Simulations et apprentissage contextualisé : Les IA génératives permettent, en l’absence d’expert disponible, de renforcer la crédibilité des situations immersives, d’adapter chaque situation à un contexte particulier, au poste de l’apprenant…
Attention : il convient de tester auprès d’un expert, la pertinence et l’actualisation des scénarios. Des scénarios obsolètes ou simplistes pourraient entraîner des lacunes dans la formation.
L’IA n’est pas une baguette magique !
- Apprentissage social dynamique : Les LXP favorisent les interactions et la collaboration entre pairs et avec l’expert formateur, via des fonctionnalités de social learning. Enrichie par l’IA, la plateforme peut analyser les données d’apprentissage, les préférences et les comportements des utilisateurs pour former des sous-groupes d’apprenants homogènes et complémentaires pour une collaboration équilibrée et riche. Les IA peuvent également intervenir dans les échanges en proposant des thèmes de réflexion, des ressources pédagogiques complémentaires pour étayer les débats et/ou une synthèse des discussions et des décisions au terme de chaque séance. Les IA peuvent enfin jouer le rôle de modérateur dans la communauté apprenante et alerter les tuteurs et formateurs en cas de besoin.
Attention : les critères utilisés par l’IA pour constituer les sous-groupes doivent être transparents et ajustables par les formateurs ou les tuteurs pour éviter une homogénéité nuisible au débat.
De même, l‘IA doit avoir été configurée pour encourager tous les membres du groupe à participer activement. Les apprenants plus introvertis ou ceux ayant moins de confiance en eux pourraient être inhibés par une IA trop présente ou directive. Il est important de maintenir un équilibre entre l’interaction guidée par l’IA et les interactions spontanées entre les apprenants. L’IA doit compléter l’interaction humaine pour la rendre plus riche et structurée, mais jamais la remplacer.
Lâcher la bride à l’IA peut nuire à l’apprenant !
Du côté service formation
- Indexation et recherche intelligentes : Trouver le bon contenu au bon moment est essentiel. L’IA utilise le traitement du langage naturel pour comprendre les requêtes des utilisateurs et suggérer les ressources les plus pertinentes. Le temps de recherche côté formateur est optimisé et l’efficacité pédagogique augmentée.
- Gestion prédictive : En analysant les tendances passées, les IA peuvent déterminer statistiquement les thèmes et/ou formats de contenus qui seront demandés à l’avenir. Les formateurs améliorent ainsi leur démarche d’amélioration continue.
- Ajustement en temps réel : Enfin, l’IA peut s’assurer d’une distribution optimale du contenu. Elle ajuste les suggestions en fonction des moments de la journée où les utilisateurs sont les plus engagés ou en fonction de leurs habitudes d’apprentissage en termes de formats (texte, vidéo, interactif) voire de méthode (inductive vs déductive, par exemple).
Attention : La qualité des données que l’IA va être amenée à analyser est cruciale. Les bases de données doivent être propres, à jour et correctement structurées pour garantir des résultats précis et pertinents.
De même, il convient d’éviter une automatisation excessive. Si l’IA peut gérer de nombreuses tâches automatiquement, une supervision humaine reste essentielle pour s’assurer que les décisions prises par les systèmes d’IA correspondent aux objectifs pédagogiques et organisationnels.
Shit in… Shit out !
TMS : si la gestion de la formation devenait une force motrice de l’entreprise ?
Les systèmes de gestion de la formation (TMS) jouent un rôle crucial dans l’administration des processus de formation. Leur portée s’étend désormais bien au-delà des tâches administratives traditionnelles. Les IA génératives offrent aux TMS l’opportunité de devenir des outils stratégiques au service du business. Automatisation des processus, contextualisation des recommandations de formation et reporting avancé permettent de dépasser le développement des compétences et d’aligner la stratégie formation avec les objectifs business.
- Gestion automatisée des formations : De la planification au suivi en passant par l’organisation matérielle et humaine des formations, les IA génératives permettent d’automatiser les processus de gestion : inscriptions, rappels pour les participants, affectation des salles virtuelles ou physiques, suggestion de créneaux horaires optimaux en fonction des disponibilités de chacun.
Résultat ? Moins de temps passé sur les tâches administratives, et plus de temps alloué à la stratégie de développement des compétences.
Attention : L’automatisation ne constitue pas l’alpha et l’oméga de la gestion administrative des formations. Il est indispensable de monitorer les IA et de mettre en place des protocoles de corrections immédiats en cas d’erreur (inscriptions erronées, rappels adressés à des personnes non inscrites…). Le service formation doit rester maître de l’IA et garder un contrôle manuel et humain sur la gestion de la formation.
Autre point à ne pas négliger, la confidentialité des données des collaborateurs pour éviter des fuites dommageables pour l’apprenant mais également pour la structure, pour respecter la réglementation (notamment RGPD et désormais IA Act).
Prudence avec les données !
- Analyse des compétences et recommandations : Pour identifier les défauts de compétences ciblées dans l’entreprise, l’intégration de l’IA dans un TMS peut s’avérer très utile en termes de productivité mais également de pertinence. En s’appuyant sur des données internes (évaluations de performance, résultats de formations précédentes, profiling) et externes (tendances du marché, attendus des postes), l’IA peut identifier les compétences manquantes ou sous-représentées au sein de l’organisation.
Attention : Le risque de biais est toujours présent dans les données historiques de l’entreprise. Ainsi des données comportant une sur-représentation ou une sous-représentation de certains groupes ou postes ou niveau hiérarchique peut conduire à une sur ou sous-représentation de certaines compétences. Il est donc essentiel de vérifier la complétude, l’actualité et l’exactitude de ses données d’entrée pour fiabiliser l’analyse par IA.
Shit in… Shit out !
- Adéquation objectifs business et formation : Une fois identifiées les manques en termes de compétences, le TMS boosté à l’IA, peut suggérer les modules/sessions de formation disponibles et appropriés. L’IA peut ainsi proposer des recommandations de parcours de formation alignés avec la stratégie de développement de l’entreprise.
Attention : L’IA pourrait proposer des formations qui, bien que pertinentes en apparence ne s’alignent pas parfaitement avec la stratégie globale de l’entreprise. Il est donc nécessaire de s’assurer que le corpus de données de contexte en entrée décrit précisément les objectifs stratégiques spécifiques de l’entreprise. Ce qui pose le problème de la confidentialité des données et le choix du modèle d’IA générative intégré par l’éditeur dans le TMS.
Prudence avec les données !
- Concordance profil personnel et formation : De la même façon, l’IA est en capacité de personnaliser les recommandations de formation en fonction des profils individuels. Elle peut intégrer dans ses recommandations le profil individuel de l’apprenant (ancienneté, parcours professionnel, compétences déjà maîtrisées), le rythme d’apprentissage, la saisonnalité du poste, les objectifs de mobilité interne…. Cette personnalisation permet d’accroître l’engagement des apprenants et de s’assurer que les compétences acquises sont en adéquation avec les besoins immédiats et futurs de l’entreprise.
Attention : Une personnalisation de l’apprentissage de chaque collaborateur, poussée à l’extrême, pourrait sans doute isoler l’apprenant et le priver d’un apprentissage collaboratif indispensable. Les besoins individuels doivent donc être analysés et positionnés au regard de l’équipe ou du département.
« On apprend toujours seul mais jamais sans les autres » comme le dit le Professeur Philippe Carré !
- Reporting : L’IA générative peut aussi être utilisée pour créer des rapports détaillés sur l’efficacité des programmes de formation. En analysant les données de participation, les taux de complétion, les résultats des évaluations, et les retours des apprenants, l’IA peut fournir des insights sur les besoins d’amélioration. Ces rapports permettent au responsable formation d’ajuster les programmes en temps réel pour maximiser leur impact.
2. Convergences intelligente ou artificielle ?
L’IA est-elle un facteur de convergence des plateformes ?
L’intégration croissante de l’intelligence artificielle dans les LMS (Learning Management Systems), LXP (Learning Experience Platforms), et TMS (Training Management Systems), pourrait bien conduire à une convergence non seulement des fonctionnalités, mais aussi des finalités de ces plateformes. Cette évolution redéfinit le paysage des technologies de formation et pousse vers une expérience d’apprentissage plus intégrée et cohérente. Elle pourrait également renforcer l’interopérabilité entre les plateformes.
Dans un contexte de rationalisation du nombre d’outils et des coûts associés, les entreprises pourraient y voir une opportunité. Mais attention à ne pas se doter d’outils sur-dimensionnés qui dépassent largement les besoins et impliquent de facto une complexité d’appropriation sans réelle justification.
Traditionnellement, les LMS se concentraient sur la gestion et la diffusion de modules de formation à distance, les LXP sur la personnalisation de l’apprentissage et la valorisation de l’expérience apprenant, et les TMS sur la gestion administrative des formations. Cependant, l’IA permet désormais à ces plateformes de partager et d’étendre leurs fonctionnalités respectives. Par exemple, un LMS enrichi par l’IA peut intégrer des éléments de personnalisation typiques des LXP, tels que des recommandations basées sur les intérêts des apprenants et le social learning. De même, les TMS peuvent bénéficier d’outils d’analyse avancée et de personnalisation pour non seulement gérer les formations, mais aussi orienter le développement des talents en fonction des besoins stratégiques de l’entreprise et proposer des parcours personnalisés en fonction du catalogue de formation.
Enjeux et Défis
L’évolution rapide des plateformes soulève plusieurs défis pour les responsables formation et les décideurs L&D :
- Complexité croissante : La sophistication des nouvelles fonctionnalités peut rendre la gestion des plateformes plus complexe. Les entreprises doivent investir dans la formation des administrateurs des plateformes pour maximiser l’utilisation des nouvelles fonctionnalités.
- Coûts d’intégration : L’ajout de fonctionnalités avancées, comme l’IA générative, implique des coûts significatifs, notamment en termes d’infrastructure (GPU, cloud) et de maintenance.
- Adoption par les utilisateurs : La réussite de ces évolutions dépend en grande partie de l’adoption par les utilisateurs finaux. Il est crucial de concevoir des interfaces intuitives et de fournir un support adapté pour accompagner la transition vers ces nouvelles technologies.
Côté atouts et défis, la convergence des plateformes LMS, LXP, et TMS pourraient présenter des opportunités pour les différentes parties prenantes, mais elle nécessite une adaptation des stratégies de déploiement et de gestion des technologies de formation :
- Création de valeur : Pour les entreprises, la convergence facilite une gestion centralisée de la formation et du développement des compétences, réduit les silos organisationnels et favorise l’accès à des données unifiées. Cette centralisation peut améliorer les prises de décision en matière de formation, permettre de suivre les progrès des collaborateurs de manière plus globale et aider à mesurer l’impact de la formation sur la performance et la satisfaction des collaborateurs.
- Intégration : Cependant, cette convergence pose également des défis techniques, notamment en termes d’intégration des systèmes existants, de gestion des données et de formation des utilisateurs. Les entreprises doivent s’assurer que leurs infrastructures technologiques sont capables de supporter cette intégration sans compromettre la performance ou la sécurité des données. En outre, une gestion du changement performante et structurée est cruciale pour garantir une bonne adoption par les utilisateurs.
- Côté éditeurs de plateformes : La convergence des LMS, LXP, et TMS pourraient nécessiter une réévaluation de leurs offres et de leurs modèles économiques. Sans doute vont-ils devoir se concentrer sur le développement de solutions qui offrent une expérience utilisateur intégrée tout en répondant aux besoins spécifiques des différents segments de marché. De plus, ils doivent anticiper les demandes croissantes en matière de personnalisation, d’analyse des données, et de compatibilité avec d’autres systèmes d’entreprise (ERP, CRM, etc.).
A l’heure du choix
Si toutes les solutions viennent à converger vers un modèle standard tout intégré, opérer un choix éclairé va devenir un challenge plus délicat encore pour le service formation ou l’organisme de formation. Quels critères privilégier ? Il est impossible d’apporter une réponse toute faite, applicable à tous les contextes, usages et cibles.
Certaines organisations privilégieront la qualité et l’accessibilité de l’interface utilisateur, d’autres la flexibilité des options de personnalisation ou la réactivité du service client, d’autres encore l’interopérabilité avec leurs propres outils, d’autres bien évidemment le coût… Comme pour tous les outils, l’analyse du besoin et des objectifs à court, moyen et long terme est indispensable.
Il en résulte, pour les éditeurs, la lourde tâche de redéfinir avec précision et clarté leurs critères différenciants et d’innover sur l’accompagnement, le conseil, les services intégrés ou sur-mesure, la flexibilité et l’adaptabilité des workflow… Dans tous les cas, la question de l’interopérabilité avec des systèmes connexes (CRM, ERP…) reste cruciale.
3. Et combien ça coûte ?
L’intégration de l’intelligence artificielle (IA) dans les plateformes LMS, LXP, et TMS représente une avancée majeure qui transforme la manière dont les entreprises abordent la formation et le développement des talents. Cependant, cette transformation peut se révéler onéreuse. Les coûts associés à l’implémentation de l’IA, tout comme les obstacles techniques et organisationnels, constituent des points cruciaux que les décideurs doivent évaluer attentivement.
Pour les éditeurs, l’intégration des innovations liées aux IA génératives dans les business models est une question clé.
Coûts d’infrastructure : les GPU
L’un des grands défis liés à l’intégration de l’IA dans les plateformes de formation réside dans les coûts d’infrastructure, notamment ceux associés aux unités de traitement graphique (GPU). Les modèles d’IA, en particulier ceux utilisés pour l’IA générative, nécessitent une puissance de calcul considérable pour fonctionner efficacement.
- Consommation de GPU : Les LMS, LXP, et TMS qui utilisent des fonctionnalités d’IA générative pour personnaliser les parcours d’apprentissage ou automatiser la création de contenu dépendent de GPU puissants pour traiter de grandes quantités de données en temps réel.
Exemple : un LMS qui personnaliserait les parcours pour 10 000 utilisateurs actifs peut nécessiter jusqu’à 2 000 heures de GPU haute performance par mois, ce qui peut représenter une dépense de plusieurs milliers de dollars par mois. - Scalabilité des ressources : Au fur et à mesure que le nombre d’utilisateurs et la complexité des modèles d’IA augmentent, les besoins en GPU s’accroissent proportionnellement. Cette scalabilité peut entraîner des coûts exponentiels, particulièrement pour les grandes organisations ou les plateformes à forte croissance.
- Coûts de maintenance et de mise à jour : Les frais récurrents liés à la maintenance des infrastructures, à la mise à jour des logiciels et à l’optimisation continue des modèles d’IA pour garantir leur efficacité renchérissent la pression financière, surtout pour les entreprises qui doivent rester à jour avec les dernières avancées technologiques.
Frais d’Utilisation des API et services cloud
L’utilisation de l’IA dans les plateformes de formation ne se limite pas aux ressources internes. De nombreuses entreprises s’appuient sur des services cloud et des API (Interfaces de Programmation Applicative) fournis par des tiers pour intégrer des fonctionnalités avancées.
- Utilisation des API : Les grands fournisseurs de services d’IA, tels qu’OpenAI, Llama, Mistral, Claude… facturent l’utilisation de leurs API en fonction du volume de requêtes, de la complexité des modèles et du niveau de service choisi.
Exemple : une plateforme qui génère des réponses en temps réel pour 100 000 requêtes par mois pourrait dépenser plusieurs milliers de dollars mensuels uniquement en frais d’utilisation d’API. - Stockage et gestion des données : L’intégration de l’IA implique également des coûts liés au stockage sécurisé des données utilisées et générées par les modèles d’IA. Les plateformes doivent souvent stocker de grandes quantités de données dans le cloud, ce qui entraîne des coûts supplémentaires. Par ailleurs, le respect des réglementations sur la protection des données, comme le RGPD, peut nécessiter des investissements dans des systèmes de sécurité avancés, augmentant ainsi les dépenses globales.
- Licences et partenariats : Pour accéder à des fonctionnalités premium ou à des services d’IA sur mesure, certaines entreprises choisissent d’établir des partenariats avec des fournisseurs ou d’acquérir des licences spéciales. Ces accords peuvent offrir des avantages, tels que des tarifs préférentiels ou un support technique dédié, mais ils représentent également un engagement financier significatif.
Défis techniques et organisationnels
Au-delà des coûts directs liés à l’utilisation de l’IA, des défis techniques et organisationnels majeurs peuvent se faire jour :
- Complexité de l’intégration : Intégrer des technologies d’IA dans des systèmes existants n’est pas une opération triviale. Les plateformes doivent souvent être adaptées pour supporter de nouvelles fonctionnalités, ce qui peut nécessiter une refonte de leur architecture technique. Cette complexité peut ralentir le déploiement de l’IA et nécessiter des compétences techniques spécialisées, augmentant ainsi les coûts de développement et de mise en œuvre.
- Formation des utilisateurs et adoption : L’introduction de l’IA dans les plateformes de formation nécessite également de former les utilisateurs finaux et les administrateurs à ces nouvelles technologies.
- Gestion de la résistance au changement : L’IA peut susciter des inquiétudes au sein des organisations, notamment en ce qui concerne la sécurité des données, la perte de contrôle sur les processus d’apprentissage, ou la crainte de voir certaines tâches automatisées. Les responsables formation doivent gérer cette résistance en communiquant clairement les avantages de l’IA et en impliquant les parties prenantes dans le processus de transition.
Quelles stratégies pour maîtriser les coûts ?
Pour relever ces défis et maîtriser les coûts associés à l’intégration de l’IA, on peut imaginer plusieurs stratégies :
- Optimisation des modèles IA : Réduire la complexité des modèles d’IA sans sacrifier leur efficacité constitue une option pour minimiser l’utilisation des GPU.
Exemple : la compression de modèles peut réduire les besoins en calcul tout en maintenant de bonnes performances. - Utilisation de l’inférence distribuée : L’inférence distribuée, qui répartit la charge de calcul entre plusieurs dispositifs ou services cloud, peut aider à réduire les coûts d’infrastructure tout en améliorant la résilience et la scalabilité des plateformes.
- Cache et réutilisation des réponses : Mettre en cache les réponses générées par l’IA pour les requêtes similaires ou répétitives permet de réduire la consommation de GPU. Cette approche est particulièrement efficace dans les environnements où les interactions sont fréquentes et similaires, comme dans les LMS avec de nombreux apprenants.
- Développement durable : Adopter des pratiques de développement durable, comme l’utilisation de GPU en mode basse consommation pendant les périodes d’inactivité ou l’exploitation de sources d’énergie renouvelables, permet non seulement de réduire les coûts mais aussi de minimiser l’empreinte carbone des plateformes.
En conclusion, l’intégration de l’IA dans les plateformes LMS, LXP, et TMS offre des avantages indéniables, mais elle impose également des coûts et des défis importants. Les entreprises doivent donc adopter une approche stratégique pour maximiser les bénéfices de ces technologies tout en maîtrisant les dépenses associées et en surmontant les obstacles techniques et organisationnels.
4. Quel modèle économique ?
On vient de l’évoquer, les coûts d’infrastructure, de développement, et de maintenance peuvent se révéler substantiels. Comment rester viables économiquement et adopter des modèles économiques qui permettent de rentabiliser ces investissements tout en offrant une valeur ajoutée claire aux utilisateurs ? Quelques pistes de réflexion….
Freemium vs Payant
Modèle freemium ou modèle payant, chacune de ces approches classiques mais qui ont pu faire leur preuve depuis bien longtemps présente des atouts et des inconvénients :
- Modèle Freemium : Dans ce modèle, les plateformes offrent une version basique gratuite des fonctionnalités IA, permettant aux utilisateurs d’accéder à des services limités, tandis que des fonctionnalités premium, plus avancées, sont accessibles via un abonnement payant. Ce modèle est efficace pour attirer un large public, permettre aux services formation et aux apprenants de tester sans engagement financier initial. Cependant, la conversion des utilisateurs gratuits en abonnés payants est cruciale pour la rentabilité. Les plateformes doivent donc s’assurer que les fonctionnalités IA premium offrent une valeur substantielle qui justifie l’abonnement, telles que des analyses avancées, des outils d’IA ultra-personnalisés, ou un support technique dédié.
- Modèle payant : À l’inverse, dans un modèle entièrement payant, tous les utilisateurs doivent souscrire à un abonnement pour accéder aux fonctionnalités IA de la plateforme. Ce modèle garantit des revenus plus stables, mais peut limiter l’accessibilité initiale, surtout pour les petites entreprises ou les utilisateurs individuels. Pour réussir avec ce modèle, les plateformes doivent offrir des fonctionnalités d’IA hautement performantes et différenciantes de la concurrence, en particulier des solutions gratuites ou moins coûteuses
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Tarification à l’usage
Une autre approche financière est la tarification basée sur l’usage. Ce modèle consiste à faire payer les utilisateurs en fonction de leur consommation réelle :
- Facturation à la carte : Les plateformes peuvent offrir un modèle de tarification flexible où les utilisateurs ne paient que pour les fonctionnalités ou les services qu’ils utilisent réellement. Exemple : un client pourrait payer en fonction du nombre de cours créés automatiquement par l’IA, ou en fonction du nombre de rapports analytiques générés chaque mois. Ce modèle peut être attractif pour les entreprises qui souhaitent maîtriser leur budget tout en ayant accès à des fonctionnalités avancées.
- Tarification par paliers : Une autre variante consiste à proposer plusieurs niveaux d’abonnement en fonction de l’usage projeté.
Exemple : une petite entreprise pourrait souscrire à un abonnement de base couvrant les besoins essentiels, tandis qu’une grande entreprise opterait pour un abonnement premium offrant des capacités illimitées en termes de création de contenu, d’analyses, et de personnalisation via l’IA.
Partenariats et subventions
Pour absorber les coûts liés à l’intégration de technologies avancées, les plateformes peuvent aussi s’appuyer sur des partenariats et des subventions :
- Partenariats : Collaborer avec des entreprises comme Google, Microsoft, ou Amazon Web Services peut permettre aux plateformes de bénéficier de tarifs préférentiels pour les services cloud ou d’IA, ou d’accéder à des infrastructures de pointe à moindre coût. Ces partenariats peuvent également inclure des échanges de compétences et des projets de co-innovation, où les deux parties bénéficient des résultats.
- Financements publics : Les plateformes peuvent également chercher à obtenir des subventions ou des financements publics pour soutenir l’innovation technologique. Le gouvernement français subventionne fortement les projets de R&D, particulièrement dans le domaine de l’éducation et de la formation. Ces subventions peuvent couvrir une partie des coûts de développement, réduire le besoin en capitaux propres et faciliter l’accès à des technologies de pointe.
5. Perspectives
L’intégration croissante de l’intelligence artificielle (IA) et d’autres technologies avancées ouvre la voie à des évolutions significatives qui auront un impact profond sur la manière dont les formations sont conçues, déployées et gérées dans les prochaines années.
- L’essor des écosystèmes intégrés : La convergence des LMS, LXP, et TMS vers des solutions plus intégrées pourrait constituer une tendance clé dans les années à venir. Les entreprises pourraient rechercher des plateformes capables de gérer de bout en bout l’expérience d’apprentissage et la gestion des talents, tout en offrant une personnalisation accrue grâce à l’IA.
Cette intégration permettra une centralisation des données, facilitant ainsi l’analyse et l’optimisation continue des parcours d’apprentissage. - Personnalisation : Avec l’évolution rapide des modèles d’IA, la personnalisation des parcours d’apprentissage deviendra, sans doute, encore plus fine et proactive. Les plateformes seront capables de s’adapter en temps réel à l’évolution des besoins des apprenants, en proposant des contenus et des méthodes pédagogiques toujours plus pertinents. Cette agilité pourrait également s’étendre à l’analyse prédictive, permettant aux entreprises d’anticiper les besoins en compétences et de préparer des plans de formation véritablement proactifs.
- Évolution vers des expériences toujours plus immersives et interactives : La réalité augmentée (AR) et la réalité virtuelle (VR) bénéficient également des avancées de l’IA. Ces outils permettront de créer des expériences d’apprentissage de plus en plus réalistes et immersives pour des formations plus engageantes et efficaces.
- Performance énergétique : Avec la prise de conscience croissante des enjeux environnementaux, les plateformes devront également se concentrer sur la durabilité de leurs infrastructures technologiques. L’optimisation de la consommation d’énergie, notamment par l’amélioration de l’efficacité des GPU pourrait bien devenir un critère majeur pour les entreprises qui cherchent à réduire leur empreinte carbone.
- Ajustement des modèles économiques : Les modèles économiques sont appelés à évoluer pour valoriser davantage la performance business générée par l’IA plutôt que les outils eux-mêmes. Cette évolution devrait inciter les éditeurs de plateformes à se concentrer sur la création de solutions qui démontrent un ROI clair et mesurable, alignant ainsi les intérêts des fournisseurs et des utilisateurs.
L’intégration des technologies avancées, et en particulier de l’intelligence artificielle sont à même de transformer en profondeur la manière dont les entreprises abordent le développement des compétences, la gestion des carrières, et la stratégie globale de formation.
Pour les responsables formation, les directeurs L&D, et les organismes de formation, ces plateformes peuvent devenir des leviers stratégiques capables d’influencer directement les performances organisationnelles. L’IA peut offrir des opportunités sans précédent pour personnaliser l’apprentissage, automatiser les processus, et améliorer l’efficacité des programmes de formation. Cependant, elle pose également des défis, notamment en termes de coûts et de complexité d’intégration, qui nécessitent une réflexion stratégique approfondie.
Les entreprises qui sauront tirer parti de ces innovations pour non seulement améliorer l’expérience d’apprentissage, mais aussi pour démontrer une réelle valeur ajoutée business prendront une longueur d’avance dans un environnement toujours plus concurrentiel. Il s’agit donc d’une transformation inéluctable, où l’adaptabilité, l’innovation, et une gestion proactive des compétences constitueront les clés du succès.
Pour finir, l’avenir des plateformes LMS, LXP, et TMS est prometteur, mais exigeant. Il demandera des investissements continus, une volonté d’expérimentation, et une capacité à repenser les modèles traditionnels de formation. En contrepartie : une force de travail mieux formée, plus engagée et alignée sur les objectifs stratégiques, prête à relever les défis du futur.
Mais alors, qu’en pensent les éditeurs de LMS, LXP, TMS ? Pour vous offrir une vision complète du marché des plateformes aujourd’hui, nous leur donnons la parole au travers de ce dossier « État de l’art ». Ils sont les plus à même de vous présenter une vision claire de la place des plateformes dans vos stratégies de formation et vous conseiller sur vos options et vos choix. N’hésitez pas à les interroger !