Consulter un tutoriel vidéo sur YouTube ou un dictionnaire en ligne, travailler son anglais dans les transports en commun grâce à une application dédiée… Pour développer leurs compétences, les professionnels ont de plus en plus recours à ces modes d’apprentissage informel numérique. C’est ce que montrent deux études conduites par le [HRM Digital Lab] de l’Institut Mines-Télécom Business School, auprès d’un échantillon représentatif de 1 000 salariés en France.
Des besoins fondamentaux
Il n’est pas nouveau que les salariés se forment par eux-mêmes au quotidien, en observant leurs collègues ou manager, en lisant des journaux professionnels, en dialoguant avec leurs pairs… Cet ensemble de comportements d’apprentissage a commencé à être étudié et formalisé dans les années 1950 dans le sillage de Knowles, considéré comme le père de l’andragogie.
Dès les années 1960, Bandura explore les phénomènes de mimétisme, où les individus apprennent en observant ou en écoutant les autres, considérés comme « modèles » ou « formateurs ponctuels ». Puis, en 1996, trois chercheurs, Morgan McCall, Robert W. Eichinger et Michael M. Lombardo, du Center for Creative Leadership (en Caroline du Nord, aux USA) ont démontré, sur la base d’une étude auprès de 200 cadres, que l’individu apprend tout au long de sa vie et de façons diverses.
Dans cette étude, les situations traditionnelles (off-the-job learning) et formelles d’apprentissage (c’est-à-dire les canaux des formations officielles et/ou certifiantes) ne représentent que 10 % du temps d’apprentissage, contre 90 % pour les temps d’apprentissage informels, plus instantanés et désorganisés.
Des modalités nouvelles
À travers deux études de cas, nous avons analysé cette réalité auprès de consultants, auditeurs, et professionnels exerçant en libéral, identifié les facteurs de recours à ces pratiques, et mis en évidence quatre modes informels d’apprentissage numérique :
- Panoramix diffuse du contenu à son village gaulois grâce aux outils tels que les réseaux sociaux. C’est le cas par exemple de Laura, 31 ans, orthophoniste qui crée, diffuse et partage du contenu qu’elle estime intéressant au sein des groupes de confrères et consœurs orthophonistes, sur les réseaux sociaux. Au sein d’un groupe Facebook, « Les Orthos et la Neuro », ils sont plus de 11 000 confrères à échanger, partager, débattre sur les sujets d’actualité et préoccupations liées à leur profession.
- Idéfix suit les tendances de son métier ou de son secteur d’activités par des mises à jour ponctuelles et réactives. C’est le cas de Vincent, 32 ans, manager au sein d’un cabinet d’audit et de conseil, qui, avant de dormir, fait défiler les actualités LinkedIn. Cette démarche de veille est opportuniste et ce mode est mobilisé si les circonstances le permettent comme l’utilisation de temps creux, d’attente et de transports.
- Astérix mobilise toutes les ressources numériques disponibles nécessaires pour atteindre son objectif. C’est le cas de Caroline, 29 ans, consultante senior, à qui on propose une mission ambitieuse, éloignée de ses compétences actuelles. Elle relève ce défi, et s’auto-forme via toutes les ressources en ligne qu’elle jugera pertinentes. Sa démarche est intense et associée à un objectif précis représenté ici par cette nouvelle mission. Il peut également s’agir d’une autre démarche personnelle, telle qu’une promotion ou une reconversion.
- Obélix réagit aux difficultés qui se présentent dans l’exercice de son activité, et utilise sa force d’apprentissage pour le bon besoin, au bon moment. C’est le cas de Sarah, 36 ans, pharmacien, qui se doit de répondre aux questionnements et demandes de conseils de ses patients. Pour cela, elle fait appel aux contacts appropriés ou s’appuie sur des sites de confiance référencés en amont pour proposer une réponse très rapide et efficace.