Au départ nous sommes un studio multimédia, créé en 1994 et rapidement connu pour ses collaborations avec les Guignols de l’Info, que nous avons adaptés sous forme de jeux sur cédéroms, ou avec les éditions du Seuil, pour lesquelles nous avons réalisé les versions interactives du célèbre Cours des Glénans qui est la bible de la voile. A l’époque, nous nous appelions In Visio. Notre culture a très tôt été marquée par cette capacité d’adaptation. Nous avions cette compétence de #design interactif et multimédia, et nous l’appliquions à des sujets variés en collaborant de façon étroite avec des gens très différents. Ça reste une de nos grandes forces : la capacité à dialoguer, à apprendre et à traduire des univers, des savoirs ou des compétences dans le langage et avec les atouts propres à nos médias.Pourquoi croyez-vous dans le pouvoir des jeux en entreprise ?
Je crois, fondamentalement, dans le pouvoir des jeux dans la représentation, l’acquisition et la transmission des savoirs et des savoir-faire. Dès lors, je crois dans leur pouvoir aussi bien en entreprise qu’à l’école ou dans nos sphères personnelles. Beaucoup de raisons de la puissance éducative des jeux sont connues : expérimenter, simuler sans risque, tester des stratégies, « faire » – les jeux sont un pivot du « learning-by-doing », très valorisé en ce moment –, exercer la créativité ou déclencher des émotions qui entrent elles aussi en jeu dans les processus cognitifs… J’en vois une autre, qui plaide tout particulièrement pour l’usage du jeu vidéo, et j’insiste sur « jeu vidéo », en #formation. Quand on développe un jeu vidéo, on écrit un logiciel. Et qui dit logiciel dit modèle de représentation. La collaboration entre experts, ingénieurs pédagogiques et game designers a ceci de particulièrement fécond qu’elle débouche sur des modèles de représentations dynamiques, précis et non caricaturaux des situations et des savoirs, sans lesquels le jeu ne peut pas exister. L’exigence de fabrication du jeu impose ce degré de profondeur en amont. En aval, jouer à un #serious game, et « gagner », c’est apprendre, par la pratique et la répétition, à maîtriser le modèle sous-jacent. Quelle meilleure façon d’échanger des savoirs et de les pratiquer dans toutes leurs dimensions ?
Comment voyez-vous le marché du serious game évoluer à 5 ans ?
Le marché du serious game fait face à un défi qualitatif : on n’est encore qu’au début du travail théorique et créatif commun entre enseignants ou ingénieurs pédagogiques d’une part, et game ou user experience designers d’autre part. Le meilleur est à venir mais je parle vraiment de défi, car essayez de me citer un serious game mondialement connu et apprécié ?… Maintenant faites la même chose avec un jeu vidéo ! Le serious game explosera en tant que genre s’il devient capable d’imposer de grandes références, de super jeux qui rendront les apprentissages passionnants. Je reviens toujours à Sim City : quel terrain de jeu et d’#apprentissage pour un urbaniste ! Mais il n’a pas été pensé pour ça, seulement pour nous faire jouer, et résultat : mille pour cent de son énorme public depuis bientôt 30 ans doit être composé de gens qui ne sont pas urbanistes… mais seraient capables de le devenir ! Voilà le défi : produire les Sim City de la connaissance dans tous les domaines et en faire des références avec un potentiel mondial. C’est ainsi que le serious game deviendra attirant, et d’abord pour les concepteurs, les artistes, les game designers… qui produiront de meilleurs jeux ! C’est un cercle vertueux.
A l’occasion du lancement de Innovation Makers nous avons eu la chance de rencontrer Jean Noël Portugal, CEo de Daesign pour un interview éclairant.