Pourquoi avez-vous écrit Formation professionnelle, la nouvelle lutte des classes ?

D’abord pour montrer la réalité du secteur, au-delà de l’image très réductrice et souvent négative que l’on en retrouve dans les médias. Nous en venons presque à un point où, quand on dit qu’on travaille dans la formation dans un dîner en ville, on se sent obligés de se justifier… Il n’y a pas que des abus dans la formation ! Ensuite parce que c’est un secteur relativement méconnu, auquel relativement peu d’ouvrages ont été consacrés. Or, il s’agit d’un sujet capital et stratégique, pour des questions de souveraineté, de développement économique, de transition démographique et écologique… Sans sombrer dans le corporatisme – il faut aussi savoir balayer devant notre porte – j’ai voulu montrer toute l’importance et même, pourquoi pas, la beauté de ce milieu et de ce métier.

Si vous receviez carte blanche pour reconfigurer entièrement le système de formation, que feriez-vous ?

Je repartirais de l’esprit de la loi Delors, qui instituait une sorte d’équilibre entre deux objectifs de la formation continue : la performance économique et l’éducation citoyenne. Il s’agit à la fois de former des actifs compétents qui vont s’insérer sur le marché du travail, et des individus éclairés, dotés d’esprit critique, et de ces métacompétences qui permettent de développer d’autres compétences. Le système devrait se situer à la fois sur des enjeux de professionnalisation et d’éducation permanente.

L’IA va-t-elle remplacer une partie des formateurs ?

Il faut d’abord rappeler l’évidence : l’IA, en soi, ne détruit aucun emploi ; ce sont les entreprises qui prennent les décisions en la matière, en toute conscience. Ne nous défaussons pas sur l’IA générative : ce n’est qu’un outil.

Un risque important de l’IA est la moyennisation descendante des contenus. Si tout est fait via ChatGPT, il y aura un nivellement par le bas et une décrédibilisation de la formation. Tout le monde en pâtira, les apprenants comme les entreprises.

La complexité du système français de formation professionnelle est-elle une fatalité ?

Non. Cette complexité est liée aux modalités de gouvernance, qui repose historiquement sur le paritarisme de gestion. Pour autant, il n’est pas forcément nécessaire de tout changer. Je ne crois pas au grand soir, à l’idée qu’il faut tout casser pour tout refaire. Quand on a une fenêtre qui laisse passer de l’air, on refait la fenêtre, pas la maison.

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